mardi 26 mai 2020

EZECHIEL 12

V 1 à 16 : saynète de l’exil

Dès le début de la création, Dieu a choisi le langage comme média essentiel de communication entre lui et l’homme. Le langage est le moyen par lequel les idées prennent corps au travers de mots qui les expriment. Il arrive cependant que, suite à des déficiences sensorielles, le média qu’est la parole ne suffise pas à rendre compte du message qu’il est sensé véhiculé. La parole, pour être entendue, a besoin des récepteurs que sont nos oreilles. Si ces organes ne fonctionnent pas, le communicant est contraint de s’adapter. Il usera d’autres moyens pour se faire entendre et comprendre. A la place de sons, des gestes ou des images suppléeront au verbe pour illustrer le message à transmettre.

Une nouvelle fois, Ezéchiel est appelé, à cause de la surdité et de l’aveuglement du peuple, à imager le message que Dieu veut communiquer à son peuple. Ezéchiel ne sera pas le seul qui, lors de son ministère, alliera les signes à la parole. Jésus, après lui, le fera aussi. La raison en est la même que pour le prophète. Les paroles que Jésus prononça en son temps n’étaient porteuses d’aucune ambiguïté. Elles exprimaient de manière limpide et sans détour le témoignage dont il était le porteur. Mais les mêmes déficiences que celles qui caractérisaient le public d’Ezéchiel affectaient le sien. Celui-ci avait des yeux pour voir, mais il ne voyait pas. Il avait des oreilles pour entendre, mais n’entendait pas. Il lui fallait donc la force de la démonstration pour que son incrédulité soit mise en évidence. Quand l’audio ne suffit pas, le visuel agit comme un second témoin qui rend inexcusable le public à qui le message est destiné.

Le public devant lequel Ezéchiel interprétera la saynète que Dieu l’appelle à jouer n’est pas celui qui est concerné par son sujet. Les vrais destinataires se trouvent à Jérusalem. Mais, à cause de ses répercussions, le message s’adresse à toute la communauté, celle qui est déjà exilée et celle qui est encore dans le pays. Regardons ce que le prophète joue et simule pour en saisir la teneur et la portée !

La saynète que met en œuvre Ezéchiel est simple. Alors qu’il se trouve dans sa maison, le prophète agit comme un homme se préparant à un exil forcé. Il prépare ses affaires pendant la journée comme pour un départ imminent. Le soir venu, acte inhabituel, il perce le mur du lieu où il se trouve, y passe ses effets et part dans l’obscurité le visage couvert, droit devant lui. Ezéchiel s’en va, mais sa façon d’agir témoigne qu’il ne sait pas où il va. Suite à sa représentation, le prophète ne dira rien. Il laissera aux spectateurs de son jeu la nuit pour réfléchir. Le lendemain matin seulement, il leur donnera l’explication de sa mise en scène.

Le message que Dieu lui a demandé de transmettre est une prophétie. Elle touche à ce qui attend, sous peu de temps, les habitants de Jérusalem et le prince qui est au milieu d’eux, Sédécias. Comme Ezéchiel l’a illustré, l’avenir qui se profile pour lui n’est pas la tranquillité, mais l’exil. La démonstration prophétique d’Ezéchiel ne se limite pas aux grandes lignes. Elle va jusque dans les détails. Ezéchiel parle d’une brèche qui sera faite dans la muraille de la ville et par laquelle le prince s’enfuira. C’est ce qui se passa. Puis il mentionne un départ du prince à l’aveugle, dans la nuit noire. Il sera emmené à Babylone, mais il ne la verra pas. C’est ce qui se produira. Fait prisonnier par Nébucadnetsar, Sédécias verra ses fils égorger devant lui, puis plus rien, car ordre sera donné de lui crever les yeux. Il finira sa vie dans une prison loin de sa terre et de ses proches : 2 Rois 25, 3 à 7. Sédécias ne sera pas le seul à subir le jugement de Dieu. Il touchera également tout son entourage, ses aides, son armée. Tous seront dispersés, éparpillés dans les nations, lorsqu’ils ne mourront pas pour beaucoup par l’épée.

Si Dieu a averti la communauté du malheur qui l’attend, la prophétie d’Ezéchiel ne se termine pas sur cette note. Elle se conclut par la promesse d’un reste pauvre qui pourra demeurer dans le pays : 2 Rois 25,22. Le malheur n’est jamais le dernier mot de Dieu. Le malheur est indissociable du jugement, mais celui-ci n’est jamais la conclusion de l’œuvre de Dieu. Il y a toujours avec notre Dieu un avenir et une espérance : Jérémie 29,11.

V 17 à 20 : second mime

Sur la base du même procédé, l’Eternel demande une fois de plus à Ezéchiel d’incarner le message dont il est porteur de sa part. Ezéchiel doit cette fois-ci mimer l’angoisse qui va étreindre les habitants de Jérusalem à l’approche des malheurs qui vont s’abattre sur eux. Parce qu’Ezéchiel est un homme et que ses auditeurs le sont aussi, il n’est difficile ni pour lui, ni pour eux de se mettre dans la peau de ceux que sa démonstration concerne. Quels seraient nos sentiments si, enfermés dans une cité, nous étions entourés d’ennemis plus forts que nous qui ne visent qu’à une chose : pénétrer dans la ville, nous faire prisonniers et nous exiler loin de chez nous ? Ne serions-nous pas, comme Ezéchiel le mime, tremblants et plein d’effroi ?

Nous avons beaucoup à apprendre de la façon avec laquelle Dieu demande à Ezéchiel de s’adresser à son peuple. La parole que Dieu nous adresse n’est pas abstraite. Elle ne se limite pas à une formulation de mots, fussent-ils les mieux choisis. Dieu veut nous rejoindre dans notre humanité.  Il veut que sa parole fasse écho en nous aux sentiments les plus profonds. Remués par la parole, il veut que nous rentrions en nous-mêmes. Pour se faire, le porteur de la parole doit être le premier bouleversé par son contenu. Avant de le délivrer, il doit se l’approprier, le vivre comme s’il ne s’adressait qu’à lui. Si la parole prêchée ne rencontre aucun écho dans le cœur de ceux à qui elle est adressée, il doit s’interroger. Il se peut que ceux-ci soient trop durs d’oreille pour l’entendre. Mais il est aussi possible que le messager n’ait pas fait corps avec son message. La parole de Dieu est faite pour l’intelligence. Mais elle vise aussi et avant tout le cœur et la conscience. Usons de paraboles, d’histoires, d’anecdotes ! N’hésitons pas, si besoin, à mimer ce que Dieu veut que nous transmettions. Mais laissons-nous en premier touchés par Dieu. C’est en homme que, de sa part, nous nous adressons à d’autres hommes.

V 21 à 28 : un proverbe démenti

Ezéchiel aurait de quoi désespérer. Il a beau ne pas ménager ses efforts pour rendre claire la parole de Dieu. Elle n’en rencontre pas moins le scepticisme. Habitués à voir les années s’écouler sans que les menaces des prophètes ne s’accomplissent, les Israélites ont fait de cette attente sans cesse reportée un proverbe : « Le temps passe, disent-ils, et aucune vision ne se réalise ! » Parce que Dieu patiente, les révélations que les messagers de Dieu reçoivent passent pour des mirages. On ne les prend plus au sérieux. Ils passent pour de beaux parleurs qui cherchent à effrayer le peuple de Dieu, mais dont on ne doit pas craindre les oracles. Puisqu’il en est ainsi, Ezéchiel annonce que Dieu va changer de méthode. Il n’y aura plus désormais de délai entre la parole dite et sa réalisation. Le peuple le comprendra alors. Ce que disent les prophètes n’est pas parole en l’air. Le temps entre la proclamation d’une parole et son accomplissement devait être mis à profit pour que le peuple se repente. Ce ne sera désormais plus le cas. Les Israélites comprendront alors que Dieu est Dieu… et ne peut être moqué indéfiniment.

Ce que vit Ezéchiel en son temps ne diffère guère de ce que nous connaissons aujourd’hui. Vingt siècles après la première venue de Jésus, la promesse de son retour a perdu pour beaucoup de sa crédibilité. N’a-t-on pas cru, à chaque période sombre de l’histoire, que l’Apocalypse allait s’accomplir ? La fin du monde n’a-t-elle pas été le sujet de maintes prédications à tous les siècles ? N’y a-t-il pas eu tout au long de l’ère chrétienne des prophètes prédisant un effondrement imminent suivi du jugement des nations ?

Les voix des prophètes se sont tues et le monde a continué. Il n’a pas compris que le délai qui lui était accordé avait en vue sa repentance. Il n’est pas facile pour nous, porteurs de la Parole de Dieu, de faire face à une telle réaction qui paraît justifiée. Parce que Dieu laisse impuni le péché et ne semble pas réagir au mal, le pécheur s’endurcit et en arrive à croire qu’il n’aura jamais à rendre compte de ses actes. Il nous faut cependant répéter à ceux qui nous entourent que l’on ne peut se moquer de Dieu indéfiniment. Le jour vient où l’on récolte ce que l’on a semé. Le temps de la patience de Dieu envers ce monde arrive à son terme ! Si les incroyants s’enfoncent toujours plus dans leurs injustices, le saint est appelé dans ce temps d’attente à progresser dans la sainteté : cf Apocalypse 22,11. Prions que notre vie entière démontre chaque jour notre foi en la véracité de la Parole divine !

 


vendredi 22 mai 2020

EZECHIEL 11

V 1 à 3 : le groupe des profiteurs

Il y a toujours eu, dans des périodes de crise, des hommes qui se sont retrouvés entre eux pour voir comment tirer le meilleur parti de la situation. Sans scrupules, ces comploteurs n’ont en vue qu’une seule chose : leur profit et leurs intérêts. Peu importe que la situation de la nation soit gravissime ! Ce qui compte pour eux n’a rien à voir avec l’ordre moral des choses. Ils n’ont d’yeux, dirait Paul, que pour leur ventre.

Alors qu’Ezéchiel est le sujet de visions des plus glorieuses, il est soudainement ramené aux réalités les plus terre à terre qui soient. Saisi par l’esprit, il est transporté à la porte de la maison de l’Eternel, côté Est. Là, il y découvre 25 hommes qui ne sont là ni pour adorer, ni pour prier, ni pour sacrifier, mais pour se concerter au sujet de leur avenir immédiat. « Certes, le jugement va venir, se disent-ils ! Mais ce n’est pas pour tout de suite. On peut encore faire des affaires ! La ville est comme une marmite ! Mais nous sommes la viande en son sein ! Si nous nous entendons entre nous, la meilleure part peut nous revenir maintenant ! » La mentalité qui prévaut dans le cœur de ces hommes est, selon Jésus, aussi celle qui primera dans le monde avant son retour. « Ce qui arriva du temps de Noé arrivera de même à l’avènement du Fils de l’homme. Car, dans les jours qui précédèrent le déluge, les hommes mangeaient et buvaient, se mariaient et mariaient leurs enfants, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche ; et ils ne se doutèrent de rien, jusqu’à ce que le déluge vînt et les emportât tous : il en sera de même à l’avènement du Fils de l’homme : Matthieu 24,37 à 39. » L’idolâtrie la plus couramment dénoncée en Israël est celle qui consiste à substituer à Dieu d’autres dieux d’origine païenne. Mais la plus récurrente est sans nul doute le matérialisme. C’est cette forme d’idolâtrie qui habite le cœur de ce groupe d’Israélites désireux de devenir, au travers de la ruine qui s’approche, les futurs notables de la ville.

Avec ce groupe, Ezéchiel a fait le tour de tout ce qui se trame dans la maison de l’Eternel. On comprend dès lors pourquoi la décision arrêtée de Dieu de quitter le temple est prise. La maison de Dieu n’est plus qu’un lieu de réunion qui sert à tous les prétextes, sauf celui pour laquelle elle a été conçue à l’origine. Face à ce qu’on y trouve, il n’y a en réalité que deux solutions possibles. Soit, comme le fera Jésus, il faut chasser avec violence tous ceux qui y trafiquent : cf Jean 2,15-16. Soit, c’est Dieu lui-même qui, en quittant le lieu, le désavoue et le livre à la colère. C’est ce qu’il décide de faire ici.

V 5 à 13 : l’épée sera votre jugement

Quel message Dieu a-t-il pour le groupe de matérialistes qui se retrouvent pour comploter contre le peuple dans sa propre maison ? Le même que pour les autres ! Le fléau qui s’approche et qu’ils ne veulent pas voir les frappera, comme il a frappé déjà nombre d’hommes avant eux. Et, pour leur signifier qu’ils sont dans l’illusion quant au temps qu’ils ont devant eux, l’un d’entre eux, Pelathia, meurt sur le champ. Il faut parfois user de méthodes cruelles pour ramener les hommes à la raison. Mais les moyens utilisés sont à la hauteur de l’aveuglement qui obscurcit les cœurs. Or, dans ce domaine, rien n’est pire que l’ambition que fait naître la soif du pouvoir et le désir de s’enrichir. C’est ce péché qui, dans la communauté nouvelle née de la résurrection du Christ, fut la cause du premier châtiment qui valut lui aussi la mort de ceux qui le commirent : cf Actes 5,1 à 10. On ne se moque pas de ce qui est sacré. La vie humaine, nous devons le savoir, n’a pas une valeur supérieure à la gloire de Dieu. Que la crainte de son nom habite le cœur de son peuple !

V 14 à 24 : message aux exilés

Si la parole de l’Eternel n’est porteuse d’aucune grâce, ni d’aucun avenir pour le groupe qui complote dans les parvis du temple, tel n’est pas le cas pour ceux qui sont exilés avec Ezéchiel en Babylonie. Certes, les compagnons d’Ezéchiel, emportés avec lui n’ont pas le privilège d’être là où se trouve le temple. Mais, à cette heure, ce n’est pas là ce qui compte. Au temps de Jérémie déjà, l’illusion qui prévalait et qui faisait que les Juifs restaient incrédules à l’égard de sa prédication, était qu’ils leur étaient impossible de croire à la menace d’une déportation à cause de la présence du temple : Jérémie 7,4. Le temple, leur dira Jérémie, est le lieu de la présence de Dieu, mais non la garantie de cette présence. En tant que bâtiment, il n’a aucune vertu sacrée si ce n’est par la présence de celui qui l’habite. Au jour où Dieu déserte le temple, il n’est plus qu’une coquille vide. Or, c’est là ce qui va se produire.

Si le temple disparaît, la présence de Dieu, qui faisait de lui un sanctuaire, ne peut être anéantie. Les Juifs exilés, dit Ezéchiel, sont loin de la maison de Dieu construite par Salomon. Mais cet éloignement ne saurait empêcher Dieu d’être présent avec eux. Destinée à leur apporter consolation, la promesse que fait Ezéchiel aux exilés dépasse le cadre de leur situation. Elle est l’anticipation prophétique de ce que sera la réalité du temple après la venue de Jésus. Le Seigneur l’a dit à la Samaritaine. Le lieu où chacun se trouve pour rendre son culte à Dieu n’est plus important. « L’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne, ni à Jérusalem que vous adorerez le Père… L’heure vient, et elle est déjà là, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité : Jean 4,21 à 23. » La promesse faite par Jésus à la samaritaine sera renouvelée à ses disciples au moment de son départ final : Matthieu 28,20. Elle est d’actualité chaque fois que quelques disciples se retrouvent quelque part en son nom : Matthieu 18,20.

A la promesse de la présence de Dieu avec eux, Ezéchiel en adjoint plusieurs qui touchent à leur avenir. La première est celle selon laquelle la situation d’exil que vivent les Israélites qui sont avec Ezéchiel à Babylone, est provisoire. Le jour viendra où l’exil se terminera. De la même façon que Dieu a agi pour disperser son peuple désobéissant, il étendra sa main pour les faire sortir du milieu des nations et les reconduire dans leur territoire, en Israël. La promesse donnée ici s’accomplira historiquement en plusieurs étapes. La première se déroulera au temps de Néhémie et d’Esdras où, sous l’impulsion des souverains perses, les Juifs recevront l’autorisation de retourner à Jérusalem pour reconstruire la ville et le temple. La seconde se produit en notre temps où, après des siècles d’exil, Israël existe de nouveau en tant que peuple sur son territoire.

Le retour d’Israël dans sa terre n’est pas, comme certains le pensent, un accident de l’histoire. Elle est la confirmation de son élection comme peuple mis à part pour le révéler. Israël est le peuple à qui Dieu a donné l’adoption, la gloire, les alliances, la loi, le culte, les promesses, les patriarches et le Christ : Romains 9,4-5. C’est sur sa racine qu’est entée l’Eglise. Les promesses données par Dieu à Abraham ne sont pas caduques, malgré la désobéissance d’Israël. Elles restent valides pour la durée des temps. Le don d’un pays propre à Israël fait partie dès le début des engagements de Dieu envers Jacob. C’est pourquoi, simultanément à l’annonce de l’exil, la promesse est faite qu’Israël reviendra de sa dispersion et sera de nouveau rassemblé sur sa terre.

A cette promesse, Dieu en ajoute une seconde qui trouve sa réalisation dans la Nouvelle Alliance. Que servirait-il en effet aux Israélites de retrouver leur terre, si ce qui a conduit Dieu à les en rejeter n’était traité ? Ce dont Israël a le plus besoin n’est pas de faire partie à nouveau du concert des peuples. Il faut qu’Israël naisse de nouveau, que le cœur de pierre des Israélites soient changés en cœur de chair, qu’un esprit nouveau, totalement différent du précédent, les habite. Ezéchiel n’est pas le seul à faire cette déclaration prophétique. Jérémie l’a précédé. Témoin de la prise de Jérusalem par les babyloniens, Jérémie a annoncé la conclusion d’une Nouvelle Alliance entre Dieu et Israël, fondée sur le pardon des péchés et une vie nouvelle engendrée par l’Esprit : Jérémie 31,31 à 34. C’est au sein de cette Nouvelle Alliance que vont se retrouver Juifs et non-Juifs, régénérés par le même souffle et sauvés par la même grâce en Jésus-Christ. Le mur de séparation qui divisait le monde entre Israël et les peuples païens est ici aboli : Ephésiens 2,11 à 18. Il n’y a plus qu’un seul peuple de Dieu, adopté et aimé en Jésus-Christ.

Pour l’heure, la pleine réalisation de la promesse est à venir. Elle s’accomplira dans sa totalité au jour où Israël repentant pleurera sur celui qu’ils ont percé : Zacharie 12,10. Ce jour sera un jour de joie pour le monde. Car, dit Paul, « si le faux pas des Juifs a fait la richesse du monde et leur déchéance la richesse des non-Juifs, cela sera d’autant plus le cas avec leur complet rétablissement : Romains 11,12. » C’est par la grâce seule que tous, Juifs et non-Juifs, sommes sauvés. Que Dieu fasse que, bientôt, Israël revienne à lui et à son Christ.


EZECHIEL 10

V 1 et 2 : nouvelle vision de la gloire de Dieu

Après sa visite dans le temple, Ezéchiel est au bénéfice d’une nouvelle vision de la gloire de Dieu. Proche de la 1ère, elle diffère d’elle par quelques détails. Nous apprenons que les êtres vivants de la 1ère vision sont en fait des chérubins. Les chérubins apparaissent dès le début de la Bible. Après qu’Adam et Eve aient péché, ce sont eux, armés de la flamme de l’épée tournoyante qui interdisent l’accès à l’arbre de vie à nos premiers parents : Genèse 3,24. Les chérubins figurent ensuite sur le couvercle de l’arche de l’alliance du tabernacle construit par Moïse : Exode 25,20. Par cet emplacement précis, Dieu voulait figurer que, dans les cieux, il siège au milieu des chérubins : 2 Samuel 6,2 ; Psaume 80,1 ; 99,1. Il est à noter qu’aucun autre chapitre de la Bible ne parle autant des chérubins que celui qui nous préoccupe. La mention des chérubins en relation avec le départ de la gloire de Dieu du temple indique que leur fonction principale est d’être les porteurs de cette gloire.

La seconde vision que reçoit Ezéchiel suit dans sa description l’ordre inverse de la 1ère. Dans la 1ère, le prophète est parti du créé pour aller vers l’incréé. Il a d’abord vu un feu, puis des êtres vivants pour finir par le trône de Dieu. Ici, Ezéchiel voit en premier le trône. C’est de lui que part l’ordre donné à l’homme revêtu de lin de se remplir les mains de charbons ardents pris entre les chérubins pour les jeter sur la ville. La première vision préparait la seconde. Maintenant qu’Ezéchiel a vu la gloire de Dieu, il n’a plus besoin d’une révélation progressive pour la découvrir. Il assiste aux préparatifs de son départ du temple qui se couple à la destruction de la ville qui l’abritait.

V 3 à 8 : la gloire dans le temple

Alors que le temps du départ approche, Ezéchiel voit la gloire de Dieu s’élever au-dessus des chérubins pour se diriger vers le seuil du temple. Pour la dernière fois, celui-ci est illuminé par la gloire. Le départ de la gloire souligne une fois de plus quelle est la raison d’être du temple. Maison de Dieu, il était le lieu de sa présence. Mis à part le fait d’être un peuple choisi, Israël se distinguait dès sa naissance des autres nations par le fait que Dieu habitait en son sein, au milieu de lui. C’était là le but de son élection : être le peuple au milieu duquel la gloire de Dieu se manifeste. Par la désertion divine du temple, Israël sombre dans le néant. Il n’est plus qu’une ruine qui témoigne d’un passé glorieux, mais révolu.

Ayant reçu l’ordre de Dieu de se munir du feu qui allait embraser la ville, l’homme vêtu de lin s’exécute. Il se dirige près d’une roue de l’un des chérubins qui, d’une main, saisit le feu qui se situe entre ses compagnons pour le lui donner. Symbole de la justice de Dieu, l’homme vêtu de lin est celui qui sauve les fidèles de Dieu et condamne les rebelles. Le Jésus qui, dans l’Apocalypse, se porte garant des élus est aussi celui qui ouvre les sceaux qui précipitent le jugement de Dieu sur le monde : Apocalypse 6,1.

V 9 à 22 : départ des chérubins

Le déplacement des chérubins suit le processus décrit dans la 1ère vision. La décision prise de la direction à prendre, les roues, semblables à des tourbillons, suivent les créatures là où elles vont. Ezéchiel assiste à l’envol de la gloire de Dieu au-dessus des chérubins. Pour la première fois, la maison de Dieu est laissée déserte. L’opération se renouvellera malheureusement une seconde fois au temps du rejet de Jésus par sa génération incrédule : Matthieu 23,37-39. Il n’y aura, certes, en ce temps, ni vision de chérubin, ni voix telle celle du Dieu Tout-Puissant. Mais la réalité sera la même. Abandonnée de Dieu, le temple et la ville ne survivront pas. Une génération plus tard, les armées romaines les détruiront eux aussi par le feu.

« L’historien Flavius Josèphe évoque un bruit semblable à celui d’une grande foule provenant de l’intérieur du sanctuaire et annonçant le départ de la présence divine… Quant à 2 Baruc, un texte apocalyptique juif de peu postérieur à 70 apr. J-C., il relate une vision : un ange de l’Eternel descend dans le lieu très saint et en retire le mobilier sacré. Une voix proclame alors : « Entrez, ennemis, venez, adversaires ! Car il est parti, celui qui gardait la maison ! »[1]

Nous devons nous souvenir que, lorsqu’il débute, le jugement commence toujours par la maison de Dieu : 1 Pierre 4,17. Aussi, ne devrions-nous pas nous étonner que l’Eglise de Jésus-Christ passe par des temps difficiles. Par la fournaise qu’elle traverse, Dieu la purifie : 1 Pierre 4,12-13. Le feu par lequel elle passe ne vise pas sa destruction, mais son épuration. Le péché et la honte qui se trouvent en elle ne peuvent hériter du royaume de Dieu. Christ s’est donné à l’Eglise, dit Paul, pour la faire paraître devant lui glorieuse, sans tache, ni ride, ni rien de semblable, mais sainte et irréprochable : Ephésiens 5,27. Dieu connaît ce qui se cache derrière la façade du temple et qui salit son nom. Prenons comme une preuve d’amour de sa part l’œuvre qu’il fait pour nous émonder en vue d’un fruit abondant à sa gloire !

 

[1] La Bible avec notes d’étude archéologiques et historiques : page 1171

EZECHIEL 9

V 1 à 7 : 7 envoyés

L’Eternel ayant rendu Ezéchiel témoin des pratiques abominables qui se faisaient dans le temple, l’heure est venue d’appliquer la sentence de jugement qui convient à la situation. C’est par le messager céleste qui a transporté le prophète en vision à Jérusalem que l’ordre est donné aux exécuteurs de la menace divine d’approcher. Ezéchiel voit alors 6 hommes venir de l’entrée supérieure du temple, côté nord. Equipés d’une arme faite pour tuer, tout indique dans leur apparence qu’ils ne sont pas là pour faire la paix. Dieu serait-il encore Dieu, s’il ne faisait que menacer sans jamais sévir ? Sa sainteté et sa justice ne réclament-elles pas, pour l’honneur de son nom, qu’il tienne sa parole ? Autant les promesses de sa bouche sont fiables, autant ses avertissements le sont ! Les moqueurs du chapitre précédent, qui pensaient que Dieu ne les voit pas : Ezéchiel 8,12, l’apprendront à leurs dépens. Dieu a tout vu, tout entendu. Il a été témoin de tout ce qui s’est fait dans le secret dans sa maison. Le temps de la grâce est passé, celui de la colère arrive.

Au temps de la guerre contre les Albigeois, au début du XIIIème siècle ap. J-C, le comte de Montfort aurait déclaré à son armée devant Béziers : « Tuez-les tous ! Dieu reconnaîtra les siens ! » Il signifiait par là que peu importe qui se trouvait dans la ville : catholiques ou albigeois, ses soldats devaient trucider tout le monde. Dieu n’est pas le comte de Montfort. A l’heure du jugement, il sait qui, parmi la foule qui est l’objet de son courroux, lui est fidèle et pas. Même si la grand majorité des Judéens lui est rebelle, il existe au milieu d’eux un reste qui se lamente et pleure, comme Loth à Sodome : 2 Pierre 2,8, sur le péché de son entourage. Il n’est pas question pour Dieu de faire subir aux justes le sort des méchants. Au milieu des 6 hommes venus pour détruire, Ezéchiel en voit un 7ème habillé de lin. Le fin lin, dit Jean dans l’Apocalypse, ce sont les œuvres justes des saints : Apocalypse 19,8. Avant que ses compagnons ne fassent leur œuvre inouïe, Dieu donne l’ordre à l’homme vêtu de lin équipé d’un écritoire, de passer au milieu de la ville pour marquer au front tous les justes. De manière évidente, l’homme les connaît. Il possède sur lui la liste de leurs noms. Ce sont tous ceux qui portent en eux la signature de la vie divine.

Avant que l’homme habillé de lin ne fasse son œuvre, Ezéchiel assiste à un spectacle solennel. La gloire de l’Eternel qui se tenait entre les chérubins dans le lieu très saint, s’élève et sort du temple. Jusque-là, Dieu avait supporté les abominations qui se commettaient dans sa maison. C’en est fini ! Dieu quitte sa demeure, le lieu de sa présence. La rupture, le divorce entre lui et le reste de son peuple en Juda est consommé. Les justes mis à part, les 6 hommes envoyés pour détruire reçoivent l’ordre de suivre l’homme vêtu de lin et de ne pas faire de quartier. Vieillards, hommes, femmes, enfants, jeunes gens, tous doivent être tués sans pitié. La tuerie doit se faire dans la ville, mais aussi dans le temple. Aussi prestigieux a-t-il été, il n’est plus la maison de Dieu, mais une coquille vide. Dieu n’y étant plus, le sang versé dans ses murs n’a plus rien de sacrilège.

L’Ecriture révèle que le même scénario que celui auquel Ezéchiel a assisté se produira à la fin des temps. La colère dont Dieu fera preuve au jour où il détruira ce monde ne sera ni unilatérale, ni arbitraire. Elle sera le salaire que Dieu paiera à ceux qui n’ont fait aucun cas de lui et de Christ. « Le Seigneur Jésus, dit Paul, apparaîtra du ciel avec les anges de sa puissance au milieu d’une flamme de feu pour punir ceux qui ne connaissent pas Dieu et ceux qui n’obéissent pas à l’Evangile de notre Seigneur Jésus-Christ : 2 Thessaloniciens 2,7-8. » En même temps, il mettra hors de portée de son jugement tous ceux qui sont scellés de son Esprit, gage de leur rédemption : Ephésiens 1,13. Personne, dans la période finale de l’histoire, n’échappera au fait d’être marqué. Les uns le seront par la marque de la bête : Apocalypse 13,16, les autres par le sceau de Dieu : Apocalypse 7,3-4 ; 14,1. La question est de savoir quelle signature nous porterons à ce moment-là !

V 8 à 11 : prière d’Ezéchiel

A la vue du spectacle effroyable qui s’offre à lui, Ezéchiel ne peut s’empêcher de supplier Dieu pour son peuple. Dieu va-t-il vraiment rayer de la carte Israël ? Jérusalem, la ville de sa demeure, va-t-elle être détruite. Ezéchiel, avant que le jugement ne se produise, n’a fait preuve d’aucune faiblesse. Il a pleinement justifié par ses messages ce qui allait arriver. Mais face à la réalité, son cœur d’homme s’émeut. La prière d’Ezéchiel ne pourra attendrir le cœur de Dieu. La faute de Juda est trop gigantesque, le mal est trop profond en lui, pour que la pays ne jouisse d’un sursis. Leur mépris à l’égard de Dieu a dépassé les bornes. Il faut que les Judéens soient punis de la sorte pour qu’ils reviennent à la raison.

Serviteur de Dieu fidèle, Ezéchiel est aussi un homme. Le cœur qui bat dans sa poitrine est un cœur d’homme. A la vue de personnes qui souffrent, il ressent la douleur comme si lui-même passait par là. Ezéchiel partage avec le Seigneur Jésus une forme de double identité. Il est à la fois le porte-parole de Dieu et un sacrificateur qui plaide pour les coupables. Il est ce que chaque enfant de Dieu est aussi dans ce monde. Le chapitre se termine par le retour du scribe qui atteste avoir fait son travail. Les dés désormais sont jetés. Une nouvelle étape, celle de l’exil, commence pour le peuple de Dieu.


EZECHIEL 8

V 1 à 4 : visions divines

Après qu’il eut donné à Ezéchiel le message qu’il devait proclamer, l’Eternel le ravit en vision jusqu’à l’intérieur du temple qui est à Jérusalem pour lui montrer ce qui provoque el lui sa colère. Si le péché provoque toujours le courroux de Dieu, celui-ci, lorsqu’il juge, ne s’en tient pas à une généralisation. C’est sur la base de faits précis que le jugement de Dieu se prononce à l’encontre des idolâtres. En général, il faut le dire, nous sommes, en tant qu’humains, très peu outrés par le mal. Le terme est trop vague et imprécis pour nous toucher. Ce n’est que lorsque nous le voyons incarné dans un visage défiguré par des coups, dans les meurtrissures diverses qu’il occasionne à ses victimes, dans les injustices qui touchent des faibles, que notre indignation se réveille. En donnant à Ezéchiel la possibilité de constater ce qu’il voit se faire dans le temple de Jérusalem, et qui est caché aux yeux de beaucoup, le Seigneur veut sensibiliser son serviteur à la légitimité de la fureur qu’il ressent à l’égard de son peuple.

Le serviteur de Dieu a besoin de la révélation de Dieu pour être le porteur de son message. La prédication n’est pas un simple exposé de connaissance. Elle correspond quelque part au compte-rendu de ce que nous avons vu et connu de Dieu par le Saint-Esprit. Notre message ne peut s’alimenter à la source stérile de la connaissance intellectuelle. Il doit provenir de ce que Dieu nous a révélé de lui. Sans cette révélation, il nous est impossible de parler des choses de Dieu avec le ton, la gravité et la profondeur qu’elles nécessitent. Car, de nous-mêmes, nous sommes aveugles. Nous sommes dans l’incapacité de ressentir la douleur qu’occasionne dans le cœur de Dieu le péché. Nous avons besoin d’être transporté dans le monde de Dieu, le royaume de la sainteté pour ressentir l’effroi, le caractère abominable que revêt toute idolâtrie à ses yeux. C’est ce que Dieu fait ici avec Ezéchiel. Il agit de manière à ce que, non seulement le prophète sache ce qu’il a à dire, mais qu’il voit pourquoi il doit le dire.

Transporté en vision dans le temple à Jérusalem, Dieu le conduit successivement à 4 endroits précis dans lesquels se pratiquaient la plus honteuse des idolâtries. Ce qu’Ezéchiel va découvrir est monstrueux en soi. Mais le pire est que c’est dans le temple, la maison sainte de Dieu, le lieu mis à part pour l’adoration de Dieu que les choses qu’Ezéchiel va voir se passent. Que l’idolâtrie se pratique dans le monde, Dieu le supporte ! Mais que celle-ci soit pratiquée avec la même intensité dans le temple de Dieu, c’est là quelque chose qui provoque sa colère comme rien d’autre ne peut le faire ! En sommes-nous conscients ? Conscients que notre corps et l’Eglise de Jésus-Christ sont un temple saint qui lui est dédié ? Conscients que rien n’attriste et ne provoque autant le courroux de Dieu que l’idolâtrie pratiquée en ce lieu ?

V 5 à 18 : les 4 abominations :

1.        La 1ère : l’idole de la jalousie : v 5 et 6

La 1ère cause d’abomination provoquant la colère de l’Eternel est l’idole dressée devant l’entrée intérieure du temple, côté nord. Cette idole, placée à la vue des fidèles dès qu’ils approchent du temple, est désignée par le Seigneur lui-même, comme l’idole de la jalousie. Le nom exprime les sentiments qu’elle provoque dans le cœur de Dieu à sa vue. Le préjudice principal que son érection à cet endroit pose est qu’elle détourne du cœur des judéens l’affection qui revenait à Dieu en vertu de son alliance avec eux. L’idole est semblable à une amante qui captive l’amour d’un époux et la déroute à son profit, brisant le cœur de l’épouse. L’Eternel ne nous donne pas d’autre indication sur l’identité de cette idole. Elle se pose en rivale à Dieu, une idole séduisante prétendant offrir à son peuple ce que lui seul peut lui donner.

A quoi correspond pour nous, dans la Nouvelle Alliance, cette idole qui égare le peuple ? A l’écoute de l’enseignement de Jésus et des apôtres, deux choses viennent à l’esprit. La première est l’Argent. Jésus l’a identifié dans le sermon sur la montagne comme le plus sérieux concurrent à Dieu : Matthieu 6,24. Dans le monde dans lequel il se trouve, le disciple de Jésus est dans le danger de faire de l’argent un dieu dans lequel il cherche ce que Dieu seul peut lui donner : sécurité, réponse à ses inquiétudes, refuge… La seconde chose que le Nouveau Testament identifie comme l’idole de la jalousie est l’amour du monde : Jacques 4,4-5. L’amour du monde est, selon Jacques, inimitié contre Dieu. Il vole à Dieu ce qui lui revient de droit. Il repose sur la satisfaction de toutes les convoitises : celles de la chair, de la vue, et de toutes les ambitions issues de l’orgueil.

L’emplacement géographique de l’idole de la jalousie suscite une interrogation. Qu’est-ce qui, à l’entrée de nos vies, de nos foyers de nos églises, saute en premier à la vue des gens ? Notre profonde affection pour Dieu ou notre goût prononcé pour le faste, le luxe, le matériel, le plaisir, l’argent… ? Les gens qui nous côtoient ne sont pas dupes. Nous pouvons leur parler de notre attachement profond à Dieu. Mais, ils remarquent vite par ce qui se trouve à l’entrée de notre vie, si nous disons ou non la vérité. Même nos locaux d’église disent quelque chose au sujet de la gloire que nous recherchons. Leur architecture, leur intérieur, l’impression qui s’en dégage dès qu’on y pénètre, tout contribue à signer ce que nous aimons.

2.       V 7 à 13 : l’idolâtrie secrète des anciens

Les pratiques idolâtres secrètes des anciens de la communauté constituent la seconde abomination qui provoque l’irritation de Dieu contre son peuple. Il aurait été impossible à Ezéchiel de les découvrir si l’Eternel ne les lui avait révélées. La gravité du péché des anciens tient à deux choses. La 1ère tient au lieu où elles se produisent : le temple, le cœur de la vie cultuelle du peuple ; la seconde, à l’identité des personnes dénoncées. Dieu aurait pu, pour donner à Ezéchiel une idée de l’ampleur du mal caché qui se trouve parmi son peuple, lui faire visiter les maisons de Jérusalem. Il aurait constaté ce qui se passait derrière leurs murs. Il ne le fait pas, car Ezéchiel n’aurait eu qu’une connaissance minime de la réalité. Il lui fallait voir le pire : le sacrilège du nom et de la gloire de Dieu dans le lieu même où ils devaient être exaltés par les plus hautes instances du pays.

Que se passe-t-il dans le secret du temple ? « Perce la muraille derrière laquelle se cachent les anciens, et tu le sauras, dit Dieu à Ezéchiel. » Ce qu’il va découvrir va le stupéfier. Dans un pièce qui n’est pas identifiée, Ezéchiel voit 70 hommes, tous responsables connus parmi la communauté, prosternés devant des divinités peintes sur les murs, représentées sous la forme de reptiles et de bêtes monstrueuses. Dans le lieu même où le Dieu unique devait être adoré, le paganisme s’est substitué au monothéisme. Ce n’est pas ici la seconde table de la loi qui est transgressée, mais le 1er commandement de la 1ère table. Si au plus haut niveau de la communauté, l’idolâtrie la plus vulgaire et la plus ténébreuse est pratiquée, que reste-t-il à faire à Dieu ?

La seconde raison de la gravité du péché qu’Ezéchiel constate tient dans l’identité des personnes qui le pratiquent. S’il s’agissait de gens du peuple, ignorants, mal éduqués, la faute serait moindre. Mais il s’agit ici de ceux qui sont à la tête de la communauté : les anciens du peuple chargés de veiller sur lui. Ce qui se passe ici n’est pas nouveau. Dans les discours qu’Il leur a inspiré, l’Eternel a souvent pris pour première cible les responsables : anciens, rois, sacrificateurs, prophètes… C’est d’eux, en effet, que le peuple tire le modèle qu’il est appelé à suivre. C’est pourquoi ce sont eux qui sont les premiers responsables des abominations qui se commettent en son sein. Jésus, lorsqu’Il sera sur terre, ne fera pas autre chose que suivre cette ligne. S’il a fait preuve de vérité envers tous dans Ses paroles, c’est à l’égard des chefs religieux de Son peuple que Ses paroles seront les plus sévères et les plus véhémentes.

Dieu va revenir plus tard sur la responsabilité particulière des bergers quant à l’état dans lequel se trouve le troupeau dont ils ont la garde : Ezéchiel 34. Nous devons, quant à nous, nous souvenir que notre responsabilité est à la hauteur du devoir qu’oblige notre fonction. Nous n’avons devant Dieu ni vie publique, ni vie privée, mais une seule vie dont nous devrons rendre compte. Ce qui est cache aux yeux des hommes ne l’est pas devant lui. Y-a-t-il malheur plus grand pour une communauté lorsque ceux qui sont à sa tête s’entendent en secret pour déshonorer le Dieu qu’ils prétendent servir ?

3.       V 14 et 15 : le culte rendu à Thammuz  

Comme les autres faits idolâtres, ce culte rendu par des femmes se déroulait dans le temple, du même côté que celui où se trouvait l’idole de la jalousie. Le dieu Thammuz était une divinité populaire de l’Orient, dont on retrouve la symbolique chez de nombreux peuples. Thammuz, comme Baal ou Osiris, était un dieu qui passait par la mort et la résurrection, grâce à Ishtar, sa déesse partenaire. Pour des raisons inconnues, peut-être à cause du caractère romantique de son histoire, la popularité de Thammuz était grande auprès des femmes.

Comme il en fut au moment où Jésus allait vers le Calvaire, les femmes de Jérusalem ne pleurent pas pour les bonnes raisons : Luc 23,28. Au lieu de se lamenter sur leur idole, c’est sur elles et sur leur peuple, au bord du jugement, qu’elles auraient dû le faire. Peut-on imaginer la scène ? Nous sommes ici au comble de l’abjection. Aller dans le temple de Dieu pour pleurer une idole qui n’est que le fruit d’un récit mythique ? Y-a-t-il pire égarement, alors que les menaces de la destruction du pays ne cessent d’être réitérées par les prophètes ? N’est-ce pas le temps de se repentir, de venir avec larmes dans le sanctuaire de Dieu, en déchirant ses vêtements, pour implorer son pardon et sa grâce ? Le culte de l’idole de la jalousie, l’idolâtrie des anciens, l’égarement dont font preuve les femmes, tout témoigne que le temps du jugement est aussi le temps où l’aveuglement est à son maximal. Quand les fondements sont renversés, interroge le psalmiste, que peut faire le juste ? : Psaume 11,3.

4.       V 16 à 18 : le culte rendu au soleil 

Continuant la visite des lieux, l’Esprit de Dieu conduit Ezéchiel dans le parvis du temple. 25 hommes, dos tourné à la maison de Dieu, se tenaient dans la direction de l’est, face au soleil. Ces adorateurs de l’astre céleste confirment le jugement de Paul sur l’essence de l’idolâtrie. « Les hommes, dit-il, ont remplace la vérité de Dieu par le mensonge. Ils adorent la créature au lieu du Créateur : Romains 1,24. » Il n’y a rien de nouveau sous le soleil. Nos peuples éduqués et christianisés ne valent pas mieux que les idolâtres panthéistes du passé. Il suffit de voir l’engouement de notre génération pour le culte de Gaïa, la terre-mère, pour s’en rendre compte.

L’idolâtrie est la mère, le commencement de tous les vices. Paul et Ezéchiel le constatent. « Comme ils n’ont pas jugé bon de connaître Dieu, dit l’apôtre, Dieu les a livrés à leur intelligence déréglée, de sorte qu’ils commettent toutes sortes d’actes indignes : Romains 1,28. » Egarés dans leur faux cultes, les Judéens ajoutent à leur faute la violence qui couvre le pays. Le temps est proche où le bâton de Dieu va s’abattre sur eux. En ce jour, les Judéens se souviendront qu’ils avaient un Dieu qui, autrefois, les avait délivrés. Ils crieront à lui, mais il ne les écoutera pas. Sa fureur les consumera sans pitié ni compassion.

EZECHIEL 7

V 1 à 6 : la fin vient

Il est des moments dans la vie où les précautions de langage sont inappropriées. Lorsqu’une catastrophe est à la porte, une seule chose compte : prévenir les habitants de la maison pour qu’ils fuient au plus vite et échappent à la mort. Pour se faire, le lanceur d’alerte doit se faire le plus insistant possible. Quitte à se répéter dix fois, il utilisera la même formule choc de manière à ce qu’elle provoque un sursaut salutaire dans le cœur de ceux qui l’entendent. Tel est le comportement d’Ezéchiel ici. Sentinelle placée par Dieu, le prophète voit venir, du haut de son poste d’observation, la fin pour Juda et tout Israël. Six fois en ces quelques versets, Ezéchiel prévient : la fin vient. Si jusqu’à ce moment, le peuple de Dieu se faisait des illusions quant à un éventuel sursis, il faut qu’il revienne rapidement à lui. Les menaces que Dieu n’a cessées de proférer sur le jugement qui attend son peuple sont en route. Ce n’est qu’une question de brefs instants avant qu’elles ne se réalisent.

Depuis longtemps, liée à la seconde venue de Jésus, la menace du jugement de Dieu pèse sur notre monde. De nombreux signes avant-coureurs de ce jour de colère se manifestent. Mais, malgré leur intensité, les hommes de notre temps sont sourds et incrédules à ce sujet. Il en est même, dit Pierre, qui se comportent comme des moqueurs à ce sujet. « Où est, disent-ils, la promesse de son retour ? En effet, depuis que nos ancêtres sont morts, tout reste dans le même état qu’au début de la création ? : 2 Pierre 3,4. » Ils veulent oublier, dit l’apôtre, qu’une fois déjà la terre fut détruite par le déluge. Or, ce que Dieu a mis en œuvre une fois, il peut le réitérer quand il le veut. Malgré les avertissements répétés et multiples de Dieu, nous devons malheureusement confesser que, par indolence, nous ne faisons pas preuve du zèle que provoque chez Ezéchiel le sentiment d’urgence qui l’anime. Nous ne supplions pas nos contemporains, comme Pierre à la Pentecôte, de se sauver de cette génération perverse qui n’échappera pas à la colère qui vient : Actes 2,40. Il nous faut avec le prophète nous souvenir de l’un des aspects vitaux de notre vocation. Nous sommes plus que des témoins des œuvres passées de Dieu en vue du salut du monde. Nous sommes des sentinelles à l’œil ouvert sur l’avenir. Avant que le jour de la colère de Dieu ne succède à la longue année de sa grâce, il nous faut insister auprès de nos concitoyens : « Nous vous en supplions ! Au nom de Christ, laissez-vous réconciliés avec Dieu : 2 Corinthiens 5,20-21. »

V 7 à 12a : le moment vient, le jour approche

« Le moment vient, le jour approche ! poursuit Ezéchiel. » Si Ezéchiel est si insistant, c’est qu’il a de bonnes raisons de l’être. Le Royaume du Nord détruit, le prophète a vu au cours des décennies qui ont suivi, celui de Juda emprunter les mêmes voies. Or, Ezéchiel le sait : les mêmes causes produisent les mêmes effets. La patience de Dieu envers les peuples s’exerce aussi longtemps qu’il y a un espoir de changement. Mais quand l’infection gagne tout le fruit, quand le péché est à son comble, quand le bien est remplacé par le mal, il n’y a plus qu’une alternative possible : la destruction. C’est à ce stade que se trouve le royaume de Juda. Après le Royaume du Nord, son tour vient et il n’y échappera pas. Le jugement de Dieu n’est pas arbitraire. Il suit une logique précise. Mais, une fois le point de non-retour atteint, il s’exerce d’une manière implacable. A ce moment-là, il n’y a plus chez Dieu ni pitié, ni compassion, seulement le désir irrépressible que justice soit faite.

V 12b à 22 : le temps des affaires est fini

Le monde dans lequel nous vivons est essentiellement un monde commerçant. Les temps ont beau être difficiles : l’obsession première des hommes continue à se porter sur l’acquisition toujours nouvelle de biens de consommation. Alors que des catastrophes naturelles s’abattaient sur des cités, des reportages ont montré que le souci premier de beaucoup était d’aller piller les magasins. Ezéchiel est témoin en son temps de cette mentalité profondément ancrée dans les cœurs. Le jour du jugement sera un choc terrible pour tous ceux pour qui vendre et acheter constitue la préoccupation première. En ce jour, ni l’argent, ni l’or n’auront de valeur. Le jour de la colère de Dieu sera le jour du nivellement de toutes les différences. Il n’y aura plus ni riches, ni pauvres. Tous jetteront leur argent et leur or par les fenêtres, ou dans les rues. Tous se lamenteront sur leur capital qui sera perdu et ne vaudra plus rien. Tous pleureront sur les idoles qu’ils se sont fabriquées avec leurs bijoux et qui ne leur seront d’aucun secours.

Que sert-il, en effet, à un homme d’être riche face à une épée qui le menace de mort ? A jour du jugement, les trois fléaux de Dieu, l’épée, la famine et la peste, se coalisent dans une parfaite synchronisation pour ne laisser échapper personne. Rassemblés sur les montagnes d’Israël, les survivants n’auront que leurs yeux pour pleurer. Tous, dit Ezéchiel, baissent les bras, plient les genoux, se lamentent couverts de sacs et tremblent comme des feuilles mortes : v 17. Le précédent que constitue la ruine qu’a connu Juda se répétera aux jours de la fin. Alors que les hommes seront soucieux de marchander et de s’enrichir, une ruine soudaine s’abattra sur eux. A cause de la chute brutale du système qui soutenait l’économie des peuples interconnectés, une dépression immense s’emparera des esprits. L’Apocalypse de Jean nous rend compte de ces moments terribles où les appuis qui soutenaient le monde se briseront sous la poussée des coups de la justice de Dieu : Apocalypse 18,9 à 19.

V 23 à 27 : le temps de l’angoisse

Le temps du jugement est un temps d’angoisse paroxystique. Alors que jusque-là on affichait un mépris royal à l’égard de la Parole de Dieu, on se mettra à chercher en Juda les prophètes, les prêtres ou les conseillers du pays. Mais leur service ne sera plus d’aucun secours. Le roi et les grands du pays sont dans l’impuissance totale. Telle une marée submergeant tout, les conquérants babyloniens s’emparent sans résistance du pays. Les hommes sont tués, faits prisonniers ou exilés, les maisons réquisitionnés, les sanctuaires profanés. C’est l’heure pour le peuple de Dieu et pour chacun de recevoir le salaire que méritent ses œuvres. Il est trop tard ici pour chercher Dieu !


jeudi 21 mai 2020

EZECHIEL 6

V 1 à 4 : message aux montagnes d’Israël

C’est à une cible singulière que l’Eternel ordonne ici à Ezéchiel de s’adresser. Jusque-là, le prophète a parlé à la communauté d’Israël : Ezéchiel 3,1. Il a illustré le message qui lui était destiné par des leçons de choses parlantes. Cette communauté, comme toutes les autres, se définit par les pratiques qui forment son quotidien. Elle y est tellement habituée qu’elle ne voit pas forcément en quoi certaines d’entre elles sont source d’irritation pour son Dieu. Il en était ainsi de l’habitude qu’avait le peuple de délaisser le temple pour se rendre dans des lieux élevés pour s’adonner à divers cultes. Les montagnes si belles d’Israël étaient devenues des lieux d’idolâtrie. Sur ses collines, près de ses cours d’eau, dans ses vallées, partout, des stèles, des autels s’élevaient auprès desquels les fils et les filles d’Israël se rendaient pour chercher aide, secours, réconfort auprès de divinités étrangères. Ces hauts lieux locaux usurpaient la place que devait avoir le temple dans le cœur des Israélites.

L’histoire des hauts lieux de culte n’est pas, au temps où écrit Ezéchiel, récente. Du temps des Cananéens déjà, les hauts lieux servaient d’endroits où les peuplades païennes sacrifiaient à leurs dieux. Alors qu’Israël était encore dans les plaines de Moab, Dieu avait indiqué clairement à Moïse qu’au jour où il conquerrait le pays, ceux-ci devaient être rasés : Nombres 33,51. Cet ordre formel était une mesure de protection. Dieu ne voulait pas qu’Israël devienne, comme les autres, un peuple superstitieux qui cherche dans les forces de la nature sa protection et sa sécurité. C’est le Créateur seul qui devait être l’objet de sa foi et de sa dévotion.

Malgré l’interdit ordonné par Dieu, très tôt les Israélites se mirent à fréquenter les hauts lieux. Il n’y allait pas pour prier des idoles, mais l’Eternel. La raison en était qu’il n’y avait pas de lieu précis, de maison où se rendre pour lui rendre un culte : 1 Rois 3,2. Le temple érigé, on aurait pu croire que l’habitude prise de se rendre sur les hauts lieux disparaisse. Ce ne fut pas le cas. Dieu y était toujours invoqué et recherché, mais, à côté de lui, on sacrifiait aussi à des divinités abominables : 1 Rois 11,7-8 ; 2 Rois 23,13. Les hauts lieux étaient les sites où s’exprimaient l’idolâtrie et le syncrétisme religieux qui avait cours dans le pays. Dans les textes historiques, la mention des hauts lieux n’est pas anodine. Elle est le critère récurrent d’évaluation de la fidélité totale des rois à Dieu ou non : 1 Rois 15,14 ; 2 Rois 18,4. Dans le message qu’il adresse aux montagnes, Dieu ne s’en prend à elle que pour ce qu’elles sont pour le peuple : des lieux d’égarement spirituel. La colère de Dieu ne va pas seulement tomber sur le peuple. Elle va s’abattre sur tous les lieux qui leur ont servi à se corrompre sur le plan cultuel.

V 5 à 10 : prostitution

Quel mot définit le mieux ce que représente l’idolâtrie aux yeux de Dieu ? Ezéchiel le dit ici : une prostitution. Une prostituée est une femme d’une autre espèce que l’adultère. L’adultère rompt l’alliance qui la liait à son mari pour s’unir à un autre homme. Elle est une épouse infidèle. La prostituée n’est pas attachée à un seul amant. Elle va d’un homme à un autre pour copuler et se fait payer la vente de ses charmes. C’est la première fois ici qu’Ezéchiel traite le sujet de l’idolâtrie sous cet angle. Il y reviendra plus tard au travers de deux chapitres sans équivoque : Ezéchiel 15 et 23.

Le but du jugement par lequel va passer le peuple est en lien direct avec le polythéisme auquel se donne le peuple de Dieu. Le problème d’Israël se situe au niveau de son cœur. En détruisant les lieux où le peuple se rendait pour forniquer avec d’autres dieux, Dieu veut briser le cœur de prostituée d’Israël. Il veut éradiquer de lui la disposition récurrente qui le pousse à se détourner constamment de lui pour se laisser charmer par des idoles. Israël ne peut être guéri que s’il se prend en dégoût pour ses pratiques abominables. Pour se faire, Dieu devra sortir Israël de son cadre. Ce n’est que dans l’exil qu’il aura le recul nécessaire pour juger du caractère haïssable de son péché pour Dieu. James Packer dans son livre « Connaître Dieu » nous donne les raison de cette détestation :

« Dieu dit de manière très catégorique : Tu ne te feras point d’image taillée, ni de représentation quelconque des choses pour t’aider dans le culte que t rends à Dieu : Exode 20,4… Qu’est-ce qui justifie une interdiction aussi sévère ? :

1.        Les images déshonorent Dieu parce qu’elles ternissent sa gloire. Les représentations des choses qui sont dans les cieux (soleil, lune, étoiles), sur la terre (hommes, animaux, oiseaux, insectes) et dans la mer (poissons, mammifères, crustacés) sont précisément incapables de représenter le Créateur. Ce n’est pas dans le monde, écrivait Calvin, que nous pourrons trouver une image authentique de Dieu…

2.       Les images égarent les hommes. Elles font naître des idées fausses sur Dieu. Parce qu’elles sont insuffisantes, imparfaites, impropres, elles faussent l’idée que nous avons de Dieu, fixent dans nos esprits des erreurs de toutes sortes concernant son caractère et sa volonté… 

Combien de fois entendons-nous des phrases du genre : « J’aime voir en Dieu un grand architecte (ou un grand mathématicien, ou un grand artiste) ; je ne peux penser à Dieu comme à un juge : j’aime penser à lui simplement comme à un père. » Nous savons par expérience que ce genre de remarques prélude souvent au refus d’accepter certaines affirmations bibliques concernant Dieu. Il est ici nécessaire d’affirmer avec la plus grande vigueur que ceux qui se croient libres d’avoir de Dieu l’idée qui leur plaît transgressent aussi le second commandement.[1] »

V 11 à 14 : les fléaux de Dieu

Dans la continuité de son rôle d’acteur, Ezéchiel est invité à illustrer la douleur terrible que va connaître le peuple de Dieu. Le prophète doit battre des mains, taper du pied et crier sa souffrance à cause des pratiques abominables de la communauté d’Israël. Anticipant ce qui va se produire, Ezéchiel voit venir les trois fléaux majeurs de Dieu sur le pays, ceux qu’il réserve pour le jour de sa colère : l’épée, la famine et la peste : Apocalypse 6,8. Le message est clair ! Que celui qui pense être sauf parce qu’il réside loin des lieux où se livre les combats ne se réjouisse pas. Il ne mourra pas par l’épée, mais par la peste. Que celui qui échappe à ces deux maux ne se croit pas tiré d’affaire. Il périra par la famine. Les anciens lieux de culte n’évoqueront plus pour les survivants l’idolâtrie à laquelle ils se sont adonnés. Ils seront les tombeaux des victimes tuées par les fléaux divins. C’est là, autour de leurs autels, que seront dispersés leurs ossements et leurs cadavres.



[1] Connaître Dieu : James Packer : Edition Grâce et vérité.


mercredi 20 mai 2020

EZECHIEL 5

V 1 à 4 : la barbe rasée

A la suite des instructions précédentes, Ezéchiel est appelé à illustrer de nouveau le message qu’il destine à son peuple par une leçon de choses marquante. Dans le chapitre précédent, Ezéchiel devait être lié de cordes et se tenir couché pendant 430 jours face à la maquette de la ville assiégée qu’il avait fabriquée. Cette fois-ci, c’est à sa physionomie que l’Eternel lui demande de s’attaquer, en se rasant complètement la tête, barbe et cheveux. Le symbolisme auquel va se plier le prophète dépasse le stade de l’illustration. En tant que prêtre, nous ne savons pas si Ezéchiel avait fait vœu de naziréat. Dans ce cas, ses cheveux et sa barbe étaient signes de consécration totale à Dieu : Nombres 6,5. Outre ce fait, il est connu que les Israélites portaient souvent une longue barbe, dont la loi interdisait de couper les coins : Lévitique 19,27. Se couper les cheveux ou la barbe était un geste fort que l’on pratiquait sur soi en signe de deuil : Esaïe 15,2. C’est ce message que Dieu demande à Ezéchiel de faire passer à son peuple.

La parabole que Dieu demande à Ezéchiel d’utiliser pour parler à son peuple ne se limite pas au rasage de ses cheveux et de sa barbe. Elle se poursuit par un tri des éléments obtenus en trois tas pesés et distincts. Un tiers de la masse pileuse récupérée devait être brûlée au milieu de la ville, un tiers frappé par l’épée autour de la cité, et un tiers dispersé au vent et poursuivie par l’épée. L’illustration est sans ambiguïté quant à sa signification prophétique. Le peuple de Dieu ne doit pas s’attendre à rester dans la ville où il se trouve. Le jugement de Dieu va le décimer par le feu, par l’épée et par l’exil.

V 5 à 9 : procès de Jérusalem l

« On entend dire partout qu’il y a de l’immoralité parmi vous, et une immoralité telle qu’il ne s’en rencontre même pas chez les païens, écrit Paul aux Corinthiens : 1 Corinthiens 5,1. » Ce que Paul dit à l’Eglise de Corinthe, Ezéchiel le dit ici à Jérusalem. Jérusalem, la ville de Dieu, était destinée à devenir le phare spirituel du monde. Le respect de la loi de Dieu, de ses règles et de ses prescriptions devait donner au peuple de Dieu une sagesse qui fonderait sa réputation : cf Deutéronome 4,5-6. Mais la Jérusalem du temps d’Ezéchiel est aux antipodes du but de Dieu pour elle. En place d’être le témoignage de l’intelligence divine, Jérusalem s’est montré pire dans ses exactions, son idolâtrie et ses vices que les nations qui ne connaissaient pas Dieu. Dieu ne veut plus de cette Jérusalem-là. Il ne la supporte plus. Elle est devenue une honte pour son nom. C’est pourquoi il va lui infliger un châtiment qu’il n’a jamais appliqué et qui ne se reproduira plus dans l’histoire. Le malheur, l’extrémité dans lesquels va être plongé la ville et ses habitants, seront causés par des outils humains. Mais c’est Dieu qui en sera l’origine. Le jeu de rôle que joue Ezéchiel est là pour l’attester.

V 10 à 12 : je serai sans compassion

Avant même que les faits se produisent, la loi édictée par Moïse avait prévenu Israël. « Au milieu de l’angoisse et de la détresse où te réduira ton ennemi, tu mangeras tes enfants, la chair des fils et des filles que l’Eternel, ton Dieu, t’aura donnés… : Deutéronome 28,53 à 58. » Le volet des malédictions réservées au peuple de Dieu rebelle prévoyait que Dieu, dans son abandon, pouvait le plonger dans un état moral pire que les peuples barbares. Comme Israël a joui de toutes les bénédictions incluses dans la loi, il revenait à Dieu, en vertu de la même fidélité à sa parole, de lui appliquer toutes les menaces prévues suite à sa rébellion. L’impensable allait se produire. Le cannibalisme était une pratique connue des tribus primitives et sauvages. Il consistait à manger la chair des prisonniers de guerre. Mais ici, résultat de la tactique du siège babylonien de la ville, ce seront les membres de leur propre famille que les Juifs dévoreront pour calmer leur faim. Le triple fléau prévu par Dieu, peste, famine et épée, va s’abattre sans pitié sur Jérusalem. Il sera trop tard alors pour pleurer et se repentir.

V 13 à 17 : j’obtiendrai réparation

Il est de la justice de Dieu de rendre à chacun selon ses œuvres. Plus un homme ou un peuple a reçu de lui, plus il lui est redevable. La colère que Dieu exprime ici envers Jérusalem n’a rien d’arbitraire. Elle est le salaire que sa justice réclame pour que réparation soit faite à son honneur bafoué. Parce que Jérusalem est allé au bout de son infidélité envers Dieu, celui-ci ira au bout de sa fureur jalouse contre elle. Le mépris dont va être l’objet le peuple de Dieu n’a d’égal que celui qu’il a engendré parmi les nations à son égard par ses abominations. Le but de l’existence d’Israël est de faire connaître Dieu au monde. Lorsqu’il ne peut l’être par ses bontés, il se révèle par sa justice !


mardi 19 mai 2020

EZECHIEL 4

Il est impossible d’évoquer Dieu sans la gloire. La gloire est l’environnement dans lequel Dieu se meut comme un poisson dans l’eau ou un oiseau dans l’air. La gloire est cependant plus qu’un élément extérieur à Dieu. Elle est la manifestation, l’éclat merveilleux qui émane de son Être. La gloire est si intimement liée à Dieu que, dans son palais, tout s’écrie : Gloire ! : Psaume 29,9. La splendeur et la magnificence sont devant sa face, la gloire et la majesté sont dans son sanctuaire : Psaume 96,6. Aussi, dès la construction d’une maison pour Dieu, le tabernacle, la gloire va la remplir : Exode 40, 34 à 38. La preuve que Dieu résidait vraiment dans la tente de la Rencontre érigée par Moïse était la présence visible de la gloire.

La présence de la gloire au milieu du peuple de Dieu était la garantie de sa sécurité. Il y eut un jour où, suite à la désobéissance des Israélites, l’Eternel permit aux philistins de voler l’arche de l’alliance. L’arche était le lieu par excellence où Dieu se tenait dans le tabernacle. A cette nouvelle désastreuse, la femme d’un des fils du grand-prêtre en exercice, Eli, accoucha et mourut. Elle eut le temps d’apprendre, avant d’expirer, qu’elle donnait naissance à un fils. Elle l’appela l’enfant I-Kabod et justifia cette appellation en disant : « La gloire est bannie d’Israël ! » : 1 Samuel 4,19 à 22. I-Kabod pourrait être le titre légitime donné à cette partie du livre d’Ezéchiel. Les chapitres qui suivent nous relatent les causes du drame majeur que va être la dispersion et la disparition d’Israël du cortège des nations. Ce drame a une raison : l’idolâtrie récurrente et les forfaits multiples dont s’est rendu coupable le peuple de Dieu. La désobéissance opiniâtre dont ont fait preuve le peuple et ses dirigeants a fini par lasser la patience de Dieu au point de l’amener à prendre la décision de déserter Israël, Jérusalem et le temple. La gloire est bannie d’Israël. Elle quitte la maison de Dieu, laissant le peuple sans défense livré à ses ennemis. Ezéchiel a la charge d’annoncer cette terrible nouvelle. Avec l’aide de Dieu, il le fera dans la douleur, mais sans indulgence envers quiconque. A la lecture de son réquisitoire, nous ne pouvons dire que ce n’est que justice quand Dieu décide de se retirer de la compagnie des hommes si irrespectueux de ce qu’Il est ! Rien n’est plus terrible à vivre pour l’humanité que l’instant où Dieu retire sa gloire du milieu d’elle !

CHAPITRE 4

V 1 à 3 : mise en scène

Il y a toujours eu de la part de Dieu le souci de rendre son message explicite autrement que par la Parole. Le serpent dressé sur le bois dans le désert : Nombres 21,8-9, la manne : Exode 16,31, le rocher qui suivait le peuple : Exode 17,6, étaient des figures qui parlaient de réalités qui les dépassaient. Dans la même logique illustrative, l’Eternel appelle Ezéchiel à mettre en scène par des miniatures le siège auquel doit s’attendre Jérusalem. Qui voudrait imiter dans le Seigneur dans cette façon pédagogique d’agir doit tenir compte d’un principe mis en œuvre ici. Ce principe est que, toujours, l’illustration choisie se doit d’être aussi explicite que le message qu’elle soutient. Si ce n’est pas le cas, elle ne sert pas, mais dessert celui-ci. Si l’ordre de l’Eternel s’était arrêté au verset 3, il aurait été plaisant pour Ezéchiel de l’exécuter. Mettant à l’œuvre sa capacité créatrice, il se serait fait un jeu de faire deviner par sa construction ce que Dieu voulait communiquer à son peuple. Mais l’intention de Dieu dans l’implication de son serviteur dépasse largement la mise en œuvre figurative et théâtrale de son message.

V 4 à 13 : tu porteras leur faute

Que représente Jésus-Christ pour nous ? Lorsque nous évoquons son nom, à quel moment et à quel objet pensons-nous immédiatement ? Quelle est la scène qui, spontanément, se présente à nos yeux ? Pour le disciple du Christ, il n’y en a qu’une : la croix érigée à Golgotha. La croix est le moment majeur du ministère de Jésus, le plus douloureux, le plus abject. Il est celui où le saint Fils de Dieu a porté nos fautes devant son Père.

Ezéchiel n’est pas appelé à monter sur une croix. Mais l’Eternel lui impose une mission figurative qui est porteuse de la même réalité : porter la faute de son peuple. Couché au sol pendant 430 jours, lié par des cordes pour entraver sa liberté de mouvement, rationné dans sa nourriture et la quantité d’eau disponible pour le désaltérer, Ezéchiel devait rendre visuelle par l’épreuve qu’il lui imposait la souffrance qu’allait connaître dans un avenir proche tout son peuple. Le nombre de jours que doit passer le prophète, couché, entravé, correspond exactement au compte d’années dont Israël, puis Juda, s’est rendu coupable d’idolâtrie devant Dieu. Au service de Dieu, remarquons que, pas un seul instant, l’Eternel requerra l’accord d’Ezéchiel. Ezéchiel est le doulos de Dieu, son esclave. Comme il le lui a signifié, il ne s’appartient plus. Ce premier exercice imposé est là pour le concrétiser.

Il ne nous est pas possible de mesurer la dose de souffrances vécues par ceux qui, tout au long de l’histoire, furent choisis par Dieu pour être les porteurs de sa révélation. Un point commun les relie tous. Ils n’ont pas aimé leurs vies jusqu’à craindre la mort. Serviteurs de Dieu, ils ont tous été les témoins et les porteurs de l’image du Serviteur par excellence, Jésus-Christ. L’expiation qu’a accomplie le Fils de Dieu dans l’histoire est unique, inimitable et irremplaçable. Mais, quelque part, qu’ils l’aient précédé ou suivi, les serviteurs de Dieu rendent complètes par leurs souffrances celles qu’a connues le plus parfait d’entre eux dans son corps : Colossiens 1,24. Moïse, David, Ezéchiel, Paul nous parlent tous de Jésus. Car Dieu leur a fait l’honneur, non seulement de croire en lui, mais aussi de souffrir pour et avec lui !

V 14 à 17 : clause d’aménagement

A l’écoute du scénarii auquel il devait se soumettre pour visualiser le message que Dieu voulait communiquer à son peuple, Ezéchiel fit part à son Seigneur de ses réticences. Comme l’apôtre Pierre au jour où il reçut la vision qui lui ordonnait d’aller vers les païens : Actes 10,13-14, ce que Dieu exigeait de lui allait profondément à l’encontre de la notion de sainteté qui l’habitait. Avant d’être prophète, Ezéchiel était prêtre, un homme consacré à Dieu. Dieu le savait. Pourtant, il n’hésite pas à lui demander de faire quelque chose qu’il sait révulser profondément son serviteur. La réaction d’Ezéchiel est du même ordre, quoique pour une raison moindre, que celle de Jésus face à la perspective de la croix. Pour Ezéchiel comme pour Jésus, ce que Dieu leur demande est de se souiller. Cela consiste à se laisser salir par les déchets exécrables qui sortent des hommes. Avec d’autres, Dieu impose ici à Ezéchiel d’être de manière figurative un type du Christ. Il nous montre sous un angle inédit le caractère répugnant qu’a prise pour le Saint et le Juste l’expiation, le fait de porter les péchés de son peuple. Outre le fait de parler à son peuple, la mission du prophète est aussi, comme le reste de l’Ecriture, de parler de lui : Jean 5,39.

Par égard pour la sensibilité d’Ezéchiel, Dieu va lui accorder une mesure de faveur. Au lieu d’excréments humains, le prophète pourra, pour cuire ses aliments utiliser du fumier de bétail. La clause d’aménagement n’ôte pas le caractère répugnant de l’exercice, mais elle l’adoucit. Jésus, quant à lui, ne bénéficiera pas de cette grâce. Bien qu’ayant présenté à grands cris et avec larmes des prières à celui qui pouvait lui épargner la mort, le Fils ne bénéficiera d’aucune mesure de douceur. Il devra porter en son corps toute la malédiction conséquente au péché. Il l’a fait pour nous. Il a vécu l’horreur de la salissure de la croix pour que nous soyons lavés, purifiés à jamais de nos souillures. Que la reconnaissance de nos cœurs lui soit éternelle !

Sommes-nous prêts à être des portraits figuratifs de Christ, dans sa vie, sa mort, ses souffrances ? Serais-je prêt comme Osée d’épouser une femme infidèle pour signifier à Israël la souffrance que représente pour le cœur de Dieu ses adultères répétitifs ? Suis-je prêt comme Job de souffrir sans cause, d’être l’objet du harcèlement du malin, de tout perdre pour justifier Dieu et démontrer que son amour vaut mieux que la vie ? Nous sommes, en tant que rachetés, le corps de Christ. Par nous, Dieu veut exprimer ce qu’il est ! Que Dieu nous donne la grâce de vivre en lui et pour lui ce pour quoi il nous a choisi !