mardi 19 mai 2020

EZECHIEL 4

Il est impossible d’évoquer Dieu sans la gloire. La gloire est l’environnement dans lequel Dieu se meut comme un poisson dans l’eau ou un oiseau dans l’air. La gloire est cependant plus qu’un élément extérieur à Dieu. Elle est la manifestation, l’éclat merveilleux qui émane de son Être. La gloire est si intimement liée à Dieu que, dans son palais, tout s’écrie : Gloire ! : Psaume 29,9. La splendeur et la magnificence sont devant sa face, la gloire et la majesté sont dans son sanctuaire : Psaume 96,6. Aussi, dès la construction d’une maison pour Dieu, le tabernacle, la gloire va la remplir : Exode 40, 34 à 38. La preuve que Dieu résidait vraiment dans la tente de la Rencontre érigée par Moïse était la présence visible de la gloire.

La présence de la gloire au milieu du peuple de Dieu était la garantie de sa sécurité. Il y eut un jour où, suite à la désobéissance des Israélites, l’Eternel permit aux philistins de voler l’arche de l’alliance. L’arche était le lieu par excellence où Dieu se tenait dans le tabernacle. A cette nouvelle désastreuse, la femme d’un des fils du grand-prêtre en exercice, Eli, accoucha et mourut. Elle eut le temps d’apprendre, avant d’expirer, qu’elle donnait naissance à un fils. Elle l’appela l’enfant I-Kabod et justifia cette appellation en disant : « La gloire est bannie d’Israël ! » : 1 Samuel 4,19 à 22. I-Kabod pourrait être le titre légitime donné à cette partie du livre d’Ezéchiel. Les chapitres qui suivent nous relatent les causes du drame majeur que va être la dispersion et la disparition d’Israël du cortège des nations. Ce drame a une raison : l’idolâtrie récurrente et les forfaits multiples dont s’est rendu coupable le peuple de Dieu. La désobéissance opiniâtre dont ont fait preuve le peuple et ses dirigeants a fini par lasser la patience de Dieu au point de l’amener à prendre la décision de déserter Israël, Jérusalem et le temple. La gloire est bannie d’Israël. Elle quitte la maison de Dieu, laissant le peuple sans défense livré à ses ennemis. Ezéchiel a la charge d’annoncer cette terrible nouvelle. Avec l’aide de Dieu, il le fera dans la douleur, mais sans indulgence envers quiconque. A la lecture de son réquisitoire, nous ne pouvons dire que ce n’est que justice quand Dieu décide de se retirer de la compagnie des hommes si irrespectueux de ce qu’Il est ! Rien n’est plus terrible à vivre pour l’humanité que l’instant où Dieu retire sa gloire du milieu d’elle !

CHAPITRE 4

V 1 à 3 : mise en scène

Il y a toujours eu de la part de Dieu le souci de rendre son message explicite autrement que par la Parole. Le serpent dressé sur le bois dans le désert : Nombres 21,8-9, la manne : Exode 16,31, le rocher qui suivait le peuple : Exode 17,6, étaient des figures qui parlaient de réalités qui les dépassaient. Dans la même logique illustrative, l’Eternel appelle Ezéchiel à mettre en scène par des miniatures le siège auquel doit s’attendre Jérusalem. Qui voudrait imiter dans le Seigneur dans cette façon pédagogique d’agir doit tenir compte d’un principe mis en œuvre ici. Ce principe est que, toujours, l’illustration choisie se doit d’être aussi explicite que le message qu’elle soutient. Si ce n’est pas le cas, elle ne sert pas, mais dessert celui-ci. Si l’ordre de l’Eternel s’était arrêté au verset 3, il aurait été plaisant pour Ezéchiel de l’exécuter. Mettant à l’œuvre sa capacité créatrice, il se serait fait un jeu de faire deviner par sa construction ce que Dieu voulait communiquer à son peuple. Mais l’intention de Dieu dans l’implication de son serviteur dépasse largement la mise en œuvre figurative et théâtrale de son message.

V 4 à 13 : tu porteras leur faute

Que représente Jésus-Christ pour nous ? Lorsque nous évoquons son nom, à quel moment et à quel objet pensons-nous immédiatement ? Quelle est la scène qui, spontanément, se présente à nos yeux ? Pour le disciple du Christ, il n’y en a qu’une : la croix érigée à Golgotha. La croix est le moment majeur du ministère de Jésus, le plus douloureux, le plus abject. Il est celui où le saint Fils de Dieu a porté nos fautes devant son Père.

Ezéchiel n’est pas appelé à monter sur une croix. Mais l’Eternel lui impose une mission figurative qui est porteuse de la même réalité : porter la faute de son peuple. Couché au sol pendant 430 jours, lié par des cordes pour entraver sa liberté de mouvement, rationné dans sa nourriture et la quantité d’eau disponible pour le désaltérer, Ezéchiel devait rendre visuelle par l’épreuve qu’il lui imposait la souffrance qu’allait connaître dans un avenir proche tout son peuple. Le nombre de jours que doit passer le prophète, couché, entravé, correspond exactement au compte d’années dont Israël, puis Juda, s’est rendu coupable d’idolâtrie devant Dieu. Au service de Dieu, remarquons que, pas un seul instant, l’Eternel requerra l’accord d’Ezéchiel. Ezéchiel est le doulos de Dieu, son esclave. Comme il le lui a signifié, il ne s’appartient plus. Ce premier exercice imposé est là pour le concrétiser.

Il ne nous est pas possible de mesurer la dose de souffrances vécues par ceux qui, tout au long de l’histoire, furent choisis par Dieu pour être les porteurs de sa révélation. Un point commun les relie tous. Ils n’ont pas aimé leurs vies jusqu’à craindre la mort. Serviteurs de Dieu, ils ont tous été les témoins et les porteurs de l’image du Serviteur par excellence, Jésus-Christ. L’expiation qu’a accomplie le Fils de Dieu dans l’histoire est unique, inimitable et irremplaçable. Mais, quelque part, qu’ils l’aient précédé ou suivi, les serviteurs de Dieu rendent complètes par leurs souffrances celles qu’a connues le plus parfait d’entre eux dans son corps : Colossiens 1,24. Moïse, David, Ezéchiel, Paul nous parlent tous de Jésus. Car Dieu leur a fait l’honneur, non seulement de croire en lui, mais aussi de souffrir pour et avec lui !

V 14 à 17 : clause d’aménagement

A l’écoute du scénarii auquel il devait se soumettre pour visualiser le message que Dieu voulait communiquer à son peuple, Ezéchiel fit part à son Seigneur de ses réticences. Comme l’apôtre Pierre au jour où il reçut la vision qui lui ordonnait d’aller vers les païens : Actes 10,13-14, ce que Dieu exigeait de lui allait profondément à l’encontre de la notion de sainteté qui l’habitait. Avant d’être prophète, Ezéchiel était prêtre, un homme consacré à Dieu. Dieu le savait. Pourtant, il n’hésite pas à lui demander de faire quelque chose qu’il sait révulser profondément son serviteur. La réaction d’Ezéchiel est du même ordre, quoique pour une raison moindre, que celle de Jésus face à la perspective de la croix. Pour Ezéchiel comme pour Jésus, ce que Dieu leur demande est de se souiller. Cela consiste à se laisser salir par les déchets exécrables qui sortent des hommes. Avec d’autres, Dieu impose ici à Ezéchiel d’être de manière figurative un type du Christ. Il nous montre sous un angle inédit le caractère répugnant qu’a prise pour le Saint et le Juste l’expiation, le fait de porter les péchés de son peuple. Outre le fait de parler à son peuple, la mission du prophète est aussi, comme le reste de l’Ecriture, de parler de lui : Jean 5,39.

Par égard pour la sensibilité d’Ezéchiel, Dieu va lui accorder une mesure de faveur. Au lieu d’excréments humains, le prophète pourra, pour cuire ses aliments utiliser du fumier de bétail. La clause d’aménagement n’ôte pas le caractère répugnant de l’exercice, mais elle l’adoucit. Jésus, quant à lui, ne bénéficiera pas de cette grâce. Bien qu’ayant présenté à grands cris et avec larmes des prières à celui qui pouvait lui épargner la mort, le Fils ne bénéficiera d’aucune mesure de douceur. Il devra porter en son corps toute la malédiction conséquente au péché. Il l’a fait pour nous. Il a vécu l’horreur de la salissure de la croix pour que nous soyons lavés, purifiés à jamais de nos souillures. Que la reconnaissance de nos cœurs lui soit éternelle !

Sommes-nous prêts à être des portraits figuratifs de Christ, dans sa vie, sa mort, ses souffrances ? Serais-je prêt comme Osée d’épouser une femme infidèle pour signifier à Israël la souffrance que représente pour le cœur de Dieu ses adultères répétitifs ? Suis-je prêt comme Job de souffrir sans cause, d’être l’objet du harcèlement du malin, de tout perdre pour justifier Dieu et démontrer que son amour vaut mieux que la vie ? Nous sommes, en tant que rachetés, le corps de Christ. Par nous, Dieu veut exprimer ce qu’il est ! Que Dieu nous donne la grâce de vivre en lui et pour lui ce pour quoi il nous a choisi !


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