5ème PARTIE : LE
RENOUVELLEMENT DU CULTE
CHAPITRES 40 à 48
Deux visions encadrent le livre
d’Ezéchiel. La première est celle de la gloire de Dieu décrite au 1er
chapitre. Elle inaugure le départ de la gloire de Dieu du pays à cause de
l’idolâtrie pratiquée par ses habitants, y compris ses élites. La seconde
couvre les 9 chapitres de la fin du livre. Elle est celle du temple de Dieu
restauré. Elle nous parle du retour de la gloire de Dieu dans le pays après la
défaite définitive des forces du mal qui animaient l’empire du monde. Au moment
où Ezéchiel reçut sa première vision, il avait 30 ans. Le prophète était déjà
en exil depuis 5 ans : Ezéchiel 1,1. La
seconde vision lui parvint dans la 25ème année d’exil. Ezéchiel a
alors 50 ans. La période qui court de 30 à 50 ans est celle de l’exercice de la
sacrificature pour les prêtres destinés à cette fonction. A cause de sa
situation d’exilé, Ezéchiel n’aura jamais l’occasion d’exercer la prêtrise.
Dieu le consolera en lui donnant une vision qu’il est le seul dans l’Ecriture à
avoir reçu : celle du temple glorieux qui sera érigé au jour de la royauté
du Messie sur terre.
Si la vision que reçoit Ezéchiel
est pour un temps lointain, elle fait partie intégrante du message que Dieu lui
donne pour ceux qui vivent près de lui. Le plan de la maison a pour objet de
les faire rougir de leur conduite : Ezéchiel 43,10.
La beauté, la grandeur, la gloire du temple sont si impressionnants qu’ils ne
peuvent que confondre les Israélites qui viennent de perdre le leur. Les
dimensions du temple futur témoignent de l’amplitude glorieuse du projet de
Dieu pour Israël… et de la folie qu’a été leur idolâtrie qui a conduit la
gloire de Dieu à quitter le pays. La majesté du temple nouveau a pour objectif
de conduire les auditeurs d’Ezéchiel à la repentance. La vision a aussi un but pragmatique.
Elle servira en son temps de guide pour sa construction par ses architectes et
ses bâtisseurs : Ezéchiel 43,11.
Qui visite un haut lieu
d’architecture pour la première fois a besoin d’un guide. Ezéchiel est celui
que Dieu nous a donné. Parce qu’il ne nous est pas aisé de visualiser ce que le
prophète nous décrit, je vous invite à vous reporter aux vidéos citées en
marge. Elles vous donneront un aperçu détaillé de la ville et du temple dont le
prophète parle ici.[1]
[2]
[3]
CHAPITRE
40
V 1 à 4 :
visite guidée
Alors qu’il se trouve à Suse en
Babylonie, c’est dans le pays d’Israël qu’Ezéchiel est transporté dans la
vision qu’il reçoit de son Dieu. Dès le début du récit d’Ezéchiel, il est
essentiel souligner cette vérité : tout ce que le prophète va recevoir,
tout ce qui va lui être montré ne relève pas de réalités qui se trouvent dans
le ciel, mais qui, en un temps donné, existeront en Israël. La vision que
reçoit ici Ezéchiel confirme le message qu’il a délivré dans les chapitres
précédents. Si, jusqu’à la défaite Gog, la réputation de Dieu en Israël a été
salie et ternie, la restauration du pays va ouvrir une ère sans pareille dans
son histoire. Dieu va magnifier son nom au-delà de tout ce qui a été vu jusqu’à
présent. L’opprobre attaché à l’appellation sous laquelle Dieu se désignait
dans le passé, le Dieu d’Israël, ne sera désormais plus de mise. Pour toutes
les nations, pour tous les peuples, les noms de Dieu et celui d’Israël,
indissolublement liés, seront synonymes de gloire, de majesté et de primauté
sur tout ce qui peut se nommer.
Saisi par l’Esprit de Dieu,
Ezéchiel, 14 ans après la prise de Jérusalem, est déposé sur une haute montagne
de son pays. Bien qu’il connaisse sa patrie, Ezéchiel n’identifie pas le lieu
où il se trouve. Soit le prophète ne le reconnait pas, soit il n’a pas la
liberté de le nommer. Le fait qu’Ezéchiel se retrouve sur une position
dominante témoigne d’une volonté de Dieu. Dieu veut que ce qu’il va lui montrer
soit vu de tous et de loin. Il veut que les réalités qui constituent l’objet de
la vision dominent la vie du nouvel Israël, qu’elles soient perçues comme le
centre de son existence. Encore distant de ce qui se trouve sur cette montagne,
Ezéchiel discerne de loin des bâtiments qui lui font penser à une ville. Il
verra plus tard que cette ville n’est autre que le temple de Dieu. Un nouveau
déplacement aéroporté conduit Ezéchiel à l’entrée du lieu vu de loin, face à un
homme qui va lui servir de guide. Bien qu’ayant un aspect humain, le guide
d’Ezéchiel ne lui est pas semblable. Son aspect, dit-il, ressemble à celui du
bronze (ou l’airain). Il avait sur lui quelque chose qui relevait à la fois de
l’humain et du céleste. Le guide d’Ezéchiel tenait dans ses mains deux choses.
La 1ère était un cordon de lin, outil qui servait à mesurer de
grandes longueurs. La seconde était une canne, outil utilisé pour métrer des
mesures courtes. L’objectif du guide n’est pas seulement de faire visiter à
Ezéchiel le lieu où il se trouve. Il veut que celui-ci prenne note de tout ce
qui va lui être montré et retienne les mesures qui vont être relevées pour les
communiquer à la communauté d’Israël. Une telle directive n’est pas donnée pour
rien. Elle suppose que le plan de ce qui va être révélé à Ezéchiel serve de
guide pour le jour où la vision se réalisera. Le fait que ce rapport se trouve
dans le livre du prophète témoigne qu’il a rempli fidèlement sa mission.
V 5 à 16 :
vision du parvis extérieur du temple, côté Est
Conduit à l’endroit où il avait
vu de loin comme une ville sur une haute montagne, Ezéchiel se trouve placé
face au temple. Au vu de la place que prend dans le livre sa description
détaillée, la prophétie a pour but de souligner la place centrale qu’occupera
celui-ci au jour de la royauté terrestre du Messie d’Israël. La centralité du
temple dans l’Israël restauré, devenu pour le monde le lieu de la manifestation
de la gloire de Dieu, témoigne de la nécessité de faire du culte rendu à Dieu
le noyau de la vie de l’humanité. Alors que, depuis la genèse, Dieu était
rejeté à la périphérie de la vie des hommes, le règne du Messie rétablit
l’ordre originel des choses. Au centre de tous les regards, de toutes les
attentions, se trouve le Seigneur, à qui chacun est appelé à rendre son culte.
Placé au centre de la terre, le temple, tel un aimant, est appelé à attirer vers
Dieu le cœur de tous les hommes de quelque endroit qu’il se trouve. Le temple
est le lieu de rassemblement des peuples autour de Dieu et autour de son peuple.
En tant que petite communauté
rassemblée dans la foi autour de notre Seigneur, parfois dans de simples
maisons, nous ne prêtons guère d’attention à la majesté du cadre dans lequel,
dans le passé, nos pères ont voulu rendre culte à Dieu. Nous n’avons pas
forcément raison sur ce point. Si le fait de nous retrouver dans des lieux de
vie habituels invite nos contacts à pressentir que notre Dieu est un Dieu
proche et accessible, l’architecture impressionnante des temples et cathédrales
du passé suggérait d’emblée aux visiteurs de ces lieux qu’il se trouvait face à
un Dieu souverain revêtu de royauté et de grandeur. Le cadre dans lequel nous
rendons notre culte n’est pas le seul élément qui témoigne du Dieu auquel nous
croyons. Mais il n’est pas neutre. Avec d’autres, tels notre tenue, nos
attitudes, le contenu de nos chants, le saint respect que nous avons de son
nom, il transmet quelque chose de la conscience que nous avons de qui il est.
La visite que fait Ezéchiel du
temple qui se trouve devant lui commence par ses abords. Ezéchiel voit en
premier le mur d’enceinte qui entoure le temple de tous côtés. La hauteur du
mur comme sa largeur sont identiques. Elles font 3 mètres. Puis Ezéchiel entre
par le côté Est dans le parvis extérieur du temple. Il franchit une porte
au-delà laquelle se trouve des locaux de forme carré, ayant pour tous leurs
côtés la même mesure de trois mètres. Ce qui frappe dès le début est la
symétrie de la construction. Les mesures sont précises, identiques pour nombre
d’éléments. Dans le passé déjà, David le faisait remarquer pour la ville de
Jérusalem. « Nos pas se sont arrêtés, disait-il, dans tes portes,
Jérusalem ! Jérusalem, tu es construite comme une ville qui forme un
ensemble parfait : Psaume 122,3. »
Dieu, dit Paul, n’est pas un Dieu de désordre : 1
Corinthiens 14,33. Il est un Dieu qui aime l’harmonie. Il a fait le
corps, qui est une image de son temple, de manière à ce que chaque membre
trouve sa place à l’endroit où il l’a voulu pour l’unité de
l’organisme : 1 Corinthiens 12,12 à 14. La
construction du corps ne relève pas d’une fantaisie, mais d’une disposition
réfléchie par Dieu : 1 Corinthiens 12,24,
tout comme le temple que visite Ezéchiel. Quelle impression les visiteurs de
nos communautés ont-ils de notre Dieu en nous voyant ? Quelle image de sa
personne nos attitudes, la façon avec laquelle nous sommes devant lui, le cadre,
l’atmosphère qui se dégage de nos rencontres, leur renvoie-t-elle ? C’est
à cette première réflexion que nous invite la visite guidée du temple auquel nous
convie Ezéchiel ?
V 17 à 37 : les
entrées
Après avoir vu l’entrée côté Est,
Ezéchiel sera conduit successivement par son guide vers l’entrée Sud (v 24) et l’entrée Nord (v 35).
Il y avait ainsi trois voies d’accès, à partir de l’extérieur vers le parvis
intérieur du temple. Le côté Ouest ne comportait pas d’entrée pour la simple et
bonne raison que le temple se trouvait adossé à ce côté. Ce triple accès au
temple correspondait à une intention : celle de faciliter l’accès à tous
les pèlerins venus des quatre coins du pays et du monde pour adorer. Si, dans
le passé, l’accès au temple était réservé aux seuls Juifs circoncis, ce qui
était marqué par le fait que le tabernacle ou le temple de Salomon ne
disposaient que d’une entrée, cela n’est plus le cas ici. Paul rappelle que
l’un des bénéfices de la croix est d’avoir renversé le mur qui séparait
autrefois Juifs et païens : Ephésiens 2,14.
L’ordre donné à Jésus à ses disciples après la résurrection est de faire de
toutes les nations des disciples, ce qui sera pleinement réalisé au jour de sa
royauté : Matthieu 28,19. La façon avec
laquelle est conçu le temple que voit Ezéchiel n’a pas seulement pour objet de
communiquer à ses visiteurs une idée de la majesté et de la grandeur de celui
que l’on vient adorer. Elle est aussi porteuse d’un message d’ouverture et
d’accueil de ce Dieu. Avec ses trois ouvertures, le temple semble dire avec
Jésus : « Venez… ! », une invitation sans cesse réitérée
dans toute la Parole de Dieu : Psaumes
34,11 ; 46,8 ; 66,5.16 ; 95,1 ; 95,6 ; 100,2 ;
Esaïe 2,3.5 ; 45,20 ; 55,1.3 ; Jérémie 50,5 ; 51,10 ;
Osée 6,1 ; Michée 4,2 ; Matthieu 11,28 ; 22,4 ; 25,34.
« L’architecture, dit l’architecte japonais Tadao Ando, est un langage
universel, une affaire de géométrie mais aussi de spiritualité. Selon les
circonstances, on peut choisir un carré ou un triangle, mais, au fond, le
résultat de tout cela doit être un lieu qui parle au cœur des humains.[4] »
V 38 à 43 : des
tables pour les sacrifices
Poursuivant sa visite du côté de
l’entrée Nord, Ezéchiel vit une salle destinée à être le lieu où étaient lavées
les victimes offertes en holocaustes. De chaque côté de l’entrée du vestibule
de cette salle se trouvaient deux tables sur lesquelles on devait égorger les
animaux offerts en sacrifices. Les sacrifices offerts dans le temple étaient du
même type que ceux définis dans le lévitique : holocaustes, sacrifices d’expiation
et de culpabilité. Au total, ce fut huit tables qu’Ezéchiel dénombra en vue de
cette utilisation.
La présence de ce mobilier, rattaché
à la période précédant la venue de Christ, n’a pas manqué tout au long des âges
d’interroger les commentateurs. Selon l’auteur de l’épître aux hébreux, une
lettre destinée spécifiquement aux Juifs, la mort et la résurrection de Christ
signent l’arrêt définitif du système ancien par lequel les Juifs s’approchaient
de Dieu. « Les dons et les sacrifices présentés (sous l’Ancienne
Alliance), dit-il, ne peuvent pas rendre parfait, sur le plan de la conscience.
Avec les aliments, les boissons, les diverses ablutions et les règles relatives
au corps, c’étaient des prescriptions imposées seulement jusqu’à une époque de
réforme : Hébreux 9,9-10. » Cette
époque de réforme survenue, on comprend mal pourquoi dans le nouveau temple
érigé au temps de la royauté terrestre de Christ, il est nécessaire de
réintroduire des éléments dépassés par sa venue.
Sans fournir d’explication
complète, il nous faut tenir compte de ces quelques éléments de réponse. La 1ère
chose dont nous devons nous souvenir est que les révélations reçues par Ezéchiel
sont d’abord destinées à ses contemporains exilés. Ezéchiel exerce son
ministère dans la période la plus funeste de l’histoire d’Israël. La ville de Jérusalem
et le temple sont détruits. Le pays est dépossédé de ses habitants. La gloire
de Dieu est bannie du pays. A vue humaine, l’avenir du peuple élu est des plus sombre.
La vision qu’Ezéchiel communique a pour but de raviver l’espoir des Israélites
exilés. Ce n’est pas parce qu’Israël a failli dans sa mission que Dieu est
incapable d’accomplir ses promesses. La gloire de Dieu reviendra, après des
siècles d’absence dans le pays. Israël sera le phare spirituel des nations qui
afflueront à Jérusalem pour rendre gloire à son Dieu. La seconde chose dont il
faut nous rappeler est qu’Ezéchiel s’adressant à des Juifs leur parle le
langage qu’ils comprennent. Toute la culture juive de l’approche de Dieu repose
sur le système lévitique des sacrifices. Le salut du monde, des nations, a dit
Jésus, vient des Juifs : Jean 4,22. Est-ce
pour le signifier aux nations que Dieu, d’une manière qui n’en est que l’ombre,
le rappelle par ce mobilier et ces rites aux pèlerins venus du monde entier
pour adorer le Dieu d’Israël ? Ne prenons-nous pas aujourd’hui la Cène
dans nos Eglises dans ce but ? Les sacrifices offerts par les prêtres dans
le nouveau temple n’auraient pas de vertus purificatrices, mais valeur de
rappel. Il fallait pour que le péché soit expié que le sang soit versé. Christ
est la victime parfaite dont les sacrifices offerts ici ne sont que l’ombre. Le
dernier élément à prendre en compte est le fait que, si glorieux soit le temple
présenté ici, il n’est pas la dernière habitation de Dieu parmi les hommes.
Nous sommes ici encore dans un état temporel, auquel succèdera l’éternité. Or
Jean le précise dans son Apocalypse : dans les temps éternels, « il
n’y aura plus de temple dans la ville. Car le Seigneur Dieu tout-puissant est
son temple, ainsi que l’Agneau : Apocalypse 21,22. »
Le salut, la rédemption des nations passe par Israël. Le dernier temple cumule
tous les symboles de la révélation dont Christ est le centre et l’accomplissement.
[4] https://www.lexpress.fr/culture/art/tadao-ando-l-architecture-est-aussi-affaire-de-spiritualite_1570947.html
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