samedi 9 janvier 2021

EZECHIEL 38

 

a.       La coalition autour de Gog : v 1 à 6

De tout temps, la préoccupation première de Dieu gravite autour du sort de ses élus. L’histoire du monde ne se produit pas de manière anarchique. Elle a pour centre le peuple de Dieu. La désobéissance d’Israël, son rejet du Christ, a ouvert aux nations les portes de l’Evangile. Pendant des siècles, Israël a été écarté de l’histoire. Ce temps, pendant lequel le peuple physique du Messie a connu l’exil, n’a pas été perdu. L’Eglise de Jésus-Christ s’est développée parmi les non-Juifs, intégrant des hommes de toute nation, toute tribu, toute langue : Apocalypse 5,9. Cette période est appelée dans le langage prophétique le temps des nations : Luc 21,24. Pour autant, Israël n’est pas banni à jamais du dessein de Dieu. Enfermé pour un temps dans la désobéissance, le peuple juif n’est, pas plus que les nations, hors de portée de la grâce salvatrice et restauratrice de Dieu : cf Romains 11,28 à 32. Israël réintégré dans l’alliance, le temps des nations, marqué par la patience de Dieu, arrive à son terme. Il cède la place au jour annoncé par de nombreux prophètes, le jour de l’Eternel, jour de sa colère qui manifestera que l’Eternel est le Dieu d’Israël.

C’est, révèle Ezéchiel, par une coalition conduite par Gog, du pays de Magog, le prince de Rosh, Méshec et Tubal, que se livrera sur les terres d’Israël la bataille qui mettra fin une fois pour toutes à l’animosité des peuples contre Israël. De tout temps, bien que privés de leur territoire, les Juifs ont souffert du simple fait d’être Juifs. Accusés par les chrétiens d’être un peuple déicide, par les musulmans d’être des faussaires de la parole de Dieu, les Juifs n’ont vécu, presque nulle part, en sécurité. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que la restauration de l’Etat hébraïque provoque parmi les nations une réaction violente. Objet de la grâce de Dieu, la prospérité du peuple juif suscite bien des jalousies et éveille bien des convoitises. La coalition regroupée autour de Gog en sera l’expression concrète.

Qui est ce Gog, prince des derniers temps, qui entraînera derrière lui des peuples aussi divers que la Perse et l’Ethiopie, dans l’objectif commun d’envahir Israël pour s’accaparer ses biens ? Plusieurs indices nous aident à cerner le portrait de ce personnage. En premier, le pays de Magog, dont il est le roi, est cité dès la genèse. Magog, Méshec, Tubal et Gomer sont mentionnés comme des fils de Japhet, fils de Noé, en Genèse 10,2. Togarma était lui-même fils de Gomer. Tous ces peuples se sont constitués après le déluge, et dispersés sur la terre après l’épisode de Babel. Sur le plan géographique, Ezéchiel les situe à l’extrême Nord d’Israël, au septentrion. Si le nom de Gog apparaît ici la 1ère fois pour désigner le grand ennemi d’Israël des temps de la fin, Ezéchiel précise qu’avant lui les anciens prophètes en ont souvent parlé : v 17. On peut citer parmi eux Esaïe et, surtout, Jérémie. Alors que les Israélites se tournaient vers les faux dieux pour connaître l’avenir, Esaïe, dans un vibrant plaidoyer, rappelle que seul l’Eternel peut prédire de loin ce qui va arriver. Pour accréditer cette parole, il révèle la venue future d’un conquérant surgi du septentrion qui broiera les peuples comme le potier l’argile : Esaïe 41,25. Jérémie voit, lors de sa vocation, une marmite bouillante venir du Nord, de laquelle sortira le mal qui se déversera sur tous les habitants du pays. La vision concerne, non seulement une nation, mais tous les peuples du royaume du septentrion : Jérémie 1,15. Cette menace sera réitérée tout le long du livre : Jérémie 4,6 ; 6,1.22 ; 46,20 ; 47,2 ; 50,3. Les prophéties de Jérémie concernaient le peuple qui lui était contemporain. Elles l’avertissaient de l’invasion future du roi de Babylone. Mais elles avaient une portée plus lointaine aussi. Le prophète sépare à plusieurs reprises la Babylonie (située plutôt au nord-est d’Israël) des royaumes du septentrion, situés à l’extrême nord : Jérémie 25,26 ; 50,3.9.41 ; 51,48. Comparé au Pharaon qui retint les enfants d’Israël dans un dur esclavage, le roi du Nord figure parmi ceux qui, longtemps, ont gardé prisonniers un grand nombre d’Israélites en les empêchant de retourner dans leurs terres : Jérémie 16,15 ; 23,8 ; 31,8. Frappé par la main de Dieu, le roi du nord sera, contre son gré, contraint de libérer ses captifs, perdant du coup une main d’œuvre qui faisait sa richesse. La venue du roi du Nord sur les montagnes d’Israël scelle en quelque sorte sa revanche. Elle est une manière pour lui de récupérer son bien perdu. Il vient, dit Ezéchiel, comme une tempête (en hébreu « shoah »), terme qui, sur le plan historique récent, en dit long sur ses intentions. C’est ni plus ni moins que la dévastation totale d’Israël que la coalition nordique vise par son attaque soudaine et brutale.

A la lumière de tous ses renseignements, de nombreux commentateurs juifs et chrétiens associent la coalition nordique à une ligue d’Etats antisémites conduite par la Russie. La Russie est l’Etat qui se trouve en ligne directe à l’extrême Nord d’Israël. Outre la Russie, la coalition nordique incluerait la Turquie (Méshek et Tubal), l’Iran (la Perse), et d’autres nations moindres. Un des arguments qui plaide en faveur de cette interprétation est aussi le fait que, suite à l’effondrement de l’URSS, c’est de Russie qu’est sorti le plus gros contingent de Juifs revenus en Israël (2 à 3 millions). Avec leur départ, la Russie a perdu les cerveaux qui lui donnaient son intelligence dans nombre de domaines. Il n’est ainsi pas impossible que, jaloux de la prospérité du nouvel Etat, le roi du Nord, tel l’antique Pharaon, veuille reconquérir le nouvel Israël pour le piller de ses biens et de son savoir-faire. L’avenir nous dira si cette interprétation correspond à la réalité.

Sur le plan humain, c’est à l’initiative de Gog que cette coalition se formera. Mais, comme toujours, derrière les projets des hommes, c’est le dessein de Dieu qui s’accomplit. Sans qu’il le sache, à l’instar du Pharaon d’Egypte au temps de Moïse, Gog est l’outil que Dieu va utiliser dans les derniers temps pour provoquer le jugement des nations hostiles à Israël. Les mots utilisés pour décrire l’excitation qui va s’emparer du conquérant et le pousser à entreprendre cette guerre soulignent que la chose ne se fera pas en un jour. Gog va méditer son projet, le construire. Celui-ci va l’obséder jusqu’à s’emparer de lui totalement. Gog va en parler à ses alliés. Il va dépêcher secrètement des émissaires pour rallier d’autres, animés des mêmes sentiments que lui envers Israël. Au jour J, les troupes armées vont se lever et passer à l’attaque.

b.       Les pensées funestes de Gog : v 7 à 12

Qu’est-ce qui, au fond de lui, motive le roi de Gog à lancer cette attaque soudaine contre Israël ? Tout d’abord, Ezéchiel le souligne, le roi de Gog a une mission divine. Pour que le royaume de Dieu s’établisse, il faut que toutes les forces du mal qui agitent le monde et dressent les peuples les uns contre les autres soient anéanties. La coalition menée par Gog va être le déclencheur du jugement de Dieu sur les nations. En s’attaquant à la nation juive reconstituée, Gog ne s’en prend pas à un pays comme les autres. Il prend à parti un peuple dont l’existence relève du miracle de Dieu. Il commet la même faute que le Pharaon ancien qui, malgré toutes les preuves de l’évidence de l’action de Dieu en faveur d’Israël, s’est acharné pour sa propre perte à le poursuivre dans le but de l’assujettir à nouveau. Sorti d’une guerre qui avait comme objectif de le détruire (la seconde guerre mondiale), l’Israël d’aujourd’hui est le fait du miracle de Dieu. C’est lui désormais qui l’assure de sa protection. La fournaise de laquelle il sort ne se reproduira plus. Il y a eu une shoah contre Israël, il n’y en aura pas deux.

La seconde motivation qui pousse Gog à agir contre Israël relève d’une erreur de jugement. Gog a jaugé las capacités de défense d’Israël. Il les a comparés aux siennes cumulées à celles de ses alliés. Il a estimé que la force était largement de son côté. Au décompte des troupes qui sont avec lui, Gog a jugé qu’Israël ne fait pas le poids. Que pourrait-il face à une multitude surarmée comme elle l’est ? Dans son calcul, Gog oublie le facteur premier de la sécurité d’Israël : le Dieu qui l’a ramené à main forte et à bras étendu sur le territoire délaissé depuis des siècles par ses ancêtres exilés. Doté ce jour d’une des meilleures armées du monde, le nouvel Israël, face à Gog, devra apprendre que son salut ne se trouve pas dans sa force militaire, mais en Dieu seul. Si ce n’est lui qui agit, tous ses équipements et son arsenal seront vains pour le sauver.

La 3ème motivation mise en avant par le prophète est l’emplacement géographique d’Israël. Israël est le centre, littéralement le nombril de la terre. Placé au carrefour de trois continents, Israël est comme le pivot autour duquel tourne le monde. « La Palestine, a dit Rudyard Kipling, est la boucle du ceinturon qui entoure le monde. » Il y a pour Gog un intérêt stratégique évident à conquérir Israël. Par lui, il a, par exemple, accès à des débouchés maritimes qui lui seraient fermés autrement. Toutes les conquêtes guerrières ont pour objectif des enjeux géostratégiques. La dernière n’y échappera pas.

La dernière motivation tient au butin que Gog espère récupérer en s’assujettissant le peuple juif. La reconstitution d’Israël, chacun le sait, n’est pas seulement le miracle de la renaissance d’un peuple, retrouvant sa terre et sa langue, disparu de l’échiquier du monde depuis des siècles. Il est aussi le témoin d’un prodige économique sans pareil. Grenier du monde, terreau de cerveaux à la pointe de la technologie, Israël domine les peuples par son intelligence et son savoir-faire. La concentration de talents si grands dans un espace si restrient ne peut qu’exciter la convoitise. Gog ne vient pas en Israël pour traiter une alliance, mais pour le piller de ses richesses… qui sont autant de signes de la bénédiction divine sur son peuple reconstitué. Il devra apprendre que si l’on peut voler des hommes, on ne vole pas Dieu.

c.       Réaction du reste des nations : v 13 à 16

Si Israël est la première nation concernée par l’attaque de la coalition nordique, elle n’est pas la seule. Le monde est ainsi fait que tout mouvement qui se produit sur l’échiquier international perturbe l’ensemble des peuples. A la vue des troupes menées par Gog, déferlant de l’extrémité du septentrion, plusieurs nations vont s’interroger. Quelles sont les visées de Gog ? Pour quelles raisons mène-t-il cette attaque soudaine sur Israël ? Le pillage de ses ressources est-il son seul but ? Les interrogations viendront aussi bien de peuples du continent africain (Seba et Dedan) que du côté des nations bordant la Méditerranée (Tarsis). A priori, la réaction première ne sera pas militaire. On sait cependant, par les deux dernières guerres mondiales qui se sont produites, que rapidement un conflit de l’ordre de celui qui nous est présenté ici, ne peut que s’étendre au monde entier.

Derrière l’internationalisation du conflit, c’est le projet ultime de Dieu qui se met en œuvre. Ezéchiel l’a dit précédemment : c’est entraîné par Dieu que Gog sortira de son territoire avec ses alliés pour conquérir Israël : v 4. La guerre de Gog est le grand rendez-vous fixé par Dieu avec toutes les nations. C’est la dernière guerre, celle qui verra les armées du monde se rencontrer toutes au même endroit pour leur jugement : Zacharie 12,9. « Je rassemblerai, dit Dieu, toutes les nations pour qu’elles attaquent Jérusalem… Puis l’Eternel sortira et combattra ces nations, comme il combat le jour de la bataille : Zacharie 14,2.3. » Le jour de la bataille des peuples contre Jérusalem et l’Israël restauré sera le jour de l’Eternel, jour de colère et de fureur annoncé par de multiples prophètes : Esaïe 8,9-10 ; 24,21 à 23 ; Michée 4,11 à 14 ; Habakuk 3,7 à 15 ; Sophonie 1,14 à 18 ; 3,6 à 8 ; Jérémie 30. Joël en précise le lieu, la vallée de Josaphat : Joël 4,1 à 3 (l’Harmaguédon de l’Apocalypse : Apocalypse 16,14 à 16). La suite du récit d’Ezéchiel nous raconte, à la manière d’un reporter, ce qui arrivera ce jour-là.

d.       Stupeur et tremblement : v 17 à 23

Quelles que soient leur nature, les œuvres de Dieu ne se font jamais dans la précipitation. C’est longtemps d’avance que Dieu prépare les évènements qui mettent en route la réalisation de ses projets. La chute de l’Assyrien est soudaine, mais cela fait des lustres que le bucher est préparé pour lui : Esaïe 30,33. Satan sera, à la fin des temps, jeté dans l’étang de feu et de souffre. Mais le feu éternel qui lui est destiné est prêt depuis des siècles : Matthieu 25,41. Le jour de l’Eternel est proche, dit Sophonie, car l’Eternel a préparé un sacrifice : Sophonie 1,7. Qui lit la Parole de Dieu n’a nul besoin de consulter les voyants et les devins. Par elle, Dieu nous fait connaître longtemps à l’avance ses projets. La Bible ne nous relate pas seulement les hauts faits passés de Dieu. Elle nous révèle aussi de manière explicite comment se finit l’histoire. La déclaration de guerre du roi de Gog contre Israël sera subite. Mais depuis des millénaires, l’événement a été rapporté par les prophètes. Il suffit donc au peuple de Dieu de lire les Ecritures pour savoir à quoi s’en tenir.

Il y a dans l’histoire un jour particulier où la colère longtemps contenue de Dieu contre ses ennemis va exploser. C’est, dit Ezéchiel, le jour où Gog débarquera avec ses armées sur les montagnes d’Israël. Les peuples, avant ce jour, ont pu traiter Israël comme ils l’ont voulu. Ils se sont partagé son territoire. Ils ont disséminé sa population parmi toutes les nations : Joël 3,2. Mais l’heure est venue pour elles en ce jour de rendre compte de leurs exactions. Car, dit l’Eternel, qui touche à Israël touche à la prunelle de ses yeux, l’endroit le plus sensible de son être : Zacharie 2,8. Au jour où Gog pénétrera sur la terre d’Israël, il n’y a aucune nation qui ne ressentira le courroux de Dieu et n’en constatera stupéfaite les effets. Un tremblement de terre énorme secouera le pays et, de là, toute la surface de la terre. Les échos de ce séisme terrible et unique se font entendre dans bien des endroits dans l’Ecriture : Apocalypse 6,12 à 16 ; 11,3 ; 16,18 à 20 ; Aggée 2,6-7. Les montagnes seront renversées, les falaises s’écrouleront et toutes les murailles tomberont à terre. Des tsunamis énormes agiteront les océans provoquant la frayeur de ses occupants. Les dépôts de grêle longtemps réservés pour le jour de la bataille : Job 38,22-23, seront lâchés : Apocalypse 11,19 ; 16,21. Quel que soit le lieu où se trouvent hommes et animaux, chacun le comprendra : ce qui se passe ici n’est pas l’expression de phénomènes naturels. Dieu est en grande colère et il le fait savoir !

Alors que, sur ordre de Dieu, les éléments se déchaînent, sur le terrain militaire, le scénario qui se produisit au temps du roi Josaphat se répète : Joël 3,2.12. Israël n’aura pas à combattre. De ses yeux, il contemplera ce que Dieu est capable de faire quand sa main agit. Le récit de la bataille qui se livra au temps de Josaphat anticipe dans le détail le déroulé des évènements qui scelleront le sort de Gog et de ses armées. L’Eternel, dit le texte, plaça une embuscade contre la coalition qui réunissait les Ammonites, les Moabites et les habitants de la région montagneuse de Séir. Ils se dressèrent alors les uns contre les autres et finirent par se massacrer sous les yeux du peuple de Dieu : 2 Chroniques 20,22-23. Il en sera de même, dit Ezéchiel, avec la coalition conduite par Gog. Ils s’entretueront et retourneront leurs armes les uns contre les autres, épargnant le peuple de Dieu : v 21 ; Zacharie 14,13. Leurs épées, sorties contre Israël, seront l’instrument de leur propre jugement. Ainsi, dit Dieu, je manifesterai ma sainteté et me ferai connaître aux yeux de beaucoup de nations. Elles reconnaîtront alors que je suis l’Eternel.

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